Scénario


Pour : In Nomine Satanis/Magna Veritas


Auteur(s) :

Benjamin SCHWARZ

Illustrateurs(s) :

Justyna Jedrzejewska


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5 pages - 1000 ko

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Eastenwest > 14 - La fête



Pilleurs d'icônes

Il est des moments et des lieux où la ferveur religieuse atteint son paroxysme. Ce mini-scénario propose de faire profiter à un groupe de démons, d'une visite guidée de ces événements qu'aucun démon ne souhaiterait connaître.

Le MJ versé en culture chrétienne pourra s'amuser à trouver des lieux et des situations réelles. Pour ma part, les cours de catéchisme sont loin (et ils y sont très bien), j'opterai donc pour l'invention pure et dure tout au long de ce scénario.

Introduction

Gilg démon minable, obséquieux et zélé d'une obscure bolge administrative de seconde zone, a décidé de frapper un grand coup afin de se faire bien voir de son patron, Andromalius le prince du jugement.

Etudiant des manuscrits de la première heure aux magazines chrétiens actuels, il a conçu un plan afin de désacraliser certains lieux. Mais Gilg n'est qu'un être souffreteux et gris arborant des lunettes à double foyer et à la grosse monture carrée.

Le cerveau est donc à la recherche de mains... Qu'il trouve rapidement dans les papiers dont il a la charge (des fiches de paye en enfer ?).

Qu'importe si les joueurs n'ont rien à se reprocher vis-à-vis de la hiérarchie, Gilg est un démon administratif et n'hésitera pas à créer de fausses preuves très convaincantes.

Nanti de ces documents compromettants Gilg ira voir les joueurs et leur proposera de faire le nécessaire pour " étouffer l'affaire qui les concerne " si ceux-ci acceptent de réaliser un petit travail pour lui.

Un petit travail qui pourrait bien leur valoir la reconnaissance des puissants. " Rien de trop difficile pour des démons tels que vous, habitués à arpenter les rues...

Il s'agit simplement de dérober ou de remplacer des objets dans l'une ou l'autre église. Mais ne vous inquiétez pas, j'ai tout étudié depuis deux ans et les plans sont prêts. "

 

Le foin du saint Âne

Pour éteindre à moindre frais la méfiance de vos démons, une première mission facile

Gilg veut tester l'efficacité de ses " recrues ". Il les envoie donc dérober une relique qui ne fait pas recette dans une église posant peu de problèmes.

La relique dont il est question est donc le foin sur lequel a bavé l'âne de saint Nicolas lors d'une tournée à Argentoratum il y a de cela, oh, bien longtemps maintenant. La relique est enfermée dans une orbe de plastique soudée à un socle en argent rehaussé de scènes de pèlerinage représentant l'âne de saint Nicolas. Au fil du temps, malgré le fait qu'il soit conservé dans de saintes huiles de tournesol, le foin a commencé à se décomposer, formant de petites particules en suspension lorsqu'on remue l'orbe. Un peu comme de la neige. La relique était conservée en la cathédrale de Strasbourg ou elle rapportait bien moins d'argent que les cierges.

Aussi fut-elle vendue l'année précédente à la toute récente église de Herlisheim (Bas-Rhin), un magnifique édifice d'après guerre, illustrant les sommets atteints dans l'art du béton armé au cours du conflit. A noter que la paroisse d'Herlisheim a aussi fait l'acquisition au marché noir d'une authentique horloge russe qui attire pas mal de monde.

A cause de son faible âge, entrer dans cet édifice ne devrait pas poser trop de problèmes aux démons. Ils se sentiront tout de même assez mal à l'aise et comme épiés par l'édifice lui-même. Pour ce qui est de la mission, il faudra compter avec les cinq cars de touristes allemands qui se déversent tous les quarts d'heure dans l'entrée latérale pour admirer " l'horloche afec zon choli coq " et les " ponsomme gui vrappent la gloche ". Il y a aussi les éternelles bigotes qui font la relève pour user l'unique prie-dieu rescapé de l'ancienne église.

Enfin, le gardien de l'église est tellement content de cette relique qu'il passe beaucoup de temps à l'astiquer, à l'admirer, et à y aiguiller les touristes. Pour finir, la niche où est située l'orbe se trouve malheureusement à quelques pas de l'unique confessionnal dans lequel le père Spikhaas passe ses journées (et ses nuits) à broyer du noir dans le vain espoir qu'on vienne faire appel à ses services. Nul doute qu'un peu de bruit à côté de lui pourrait lui donner l'impression que cet heureux moment est enfin arrivé... Sans parler de l'éventualité dans laquelle les joueurs décideraient de se cacher dans le confessionnal.

Les rotules de sainte Gudule

Un second artefact un tantinet plus chaud, dans tous les sens du terme, et une première désacralisation.

C'est en 1245 en basse saxe, parait-il, que la jeune Gudule décédait après avoir eu les deux jambes broyées par un piège à ours. Comme elle était nonne, de famille noble, et qu'elle participait à l'effort de croisade en tricotant des chaussettes de laine cruciforme pour les croisés, on la béatifia. Le malheureux propriétaire du piège à ours partit en pèlerinage à Compostelle pour expier de ce que son piège avait fonctionné, et surtout pour éviter les représailles des bons chrétiens.

Ayant emmené avec lui les deux jambes qui lui restaient sur les bras, il les vendit en chemin comme reliques au chapelain d'un petit relais-église au lieu dit de l'Abbaye de Conques.

L'abbaye de Conques en Aveyron a été bâtie entre le Xième et le XIIème siècle. Mondialement réputée pour son architecture et ses sculptures, elle attire quotidiennement une clientèle touristique.

Sise sur le chemin de Compostelle, les pèlerins sont aussi légion, surtout à la belle saison, période où se déroule notre intrigue.

De la sainte relique de Gudule, ne restent que les rotules, protégées des outrages du temps dans une soupière de quartz et d'étain. Les autres os ont été depuis bien longtemps vendus à des abbayes plus riches. A remarquer aussi, les restes de Sainte Foy qui ont été volés il y a quelques siècles à l'abbaye d'Agen et enchâssés dans une statuette païenne en or, sertie de pierres précieuses et semi-précieuses.

Pour cette mission, les démons devront remplacer les restes de sainte Gudule par des os de pieds de porc amoureusement plongés dans la cuve à merde des enfers.

L'âge et la sainteté du lieu posent ici un sérieux problème (mais vos démons sont-ils au courant de ces " détails " ?) Par bonheur l'aile des reliques est justement en réfection, et les reliques ont été provisoirement placées dans des bâtiments en préfabriqué au milieu de la cour du cloître attenant à l'église. Avec d'autres vestiges et incunables, elles constituent une exposition pour pèlerins et autres touristes.

Pénétrer dans la cour et donc dans l'expo ne posera pas de problème, du moins pas pendant les horaires d'ouverture : de 10 à 12 et de 16 à 17, histoire de ne pas troubler la retraite des bons moines.

Il sera aussi possible de se rendre dans un bâtiment récent attenant et où des cellules sont louées à des prix prohibitifs aux coquillards qui souhaitent prendre part à la vie spirituelle du lieu. Un plan à l'entrée de la cour confirmera que le reste de l'édifice est constitué de bâtisses monacales dont la construction s'étale entre le Xème et le XVéme siècle. Pas question donc de visiter.

Outre ce petit problème, il faudra faire avec les étudiants zélés qui surveillent bien qu'on ne touche pas les œuvres. Sans compter que les reliques sont placées sous cloche de verre, et que le couvercle de celle qui nous intéresse est constitué au bas mot de 20 kilos de métal. Il devient donc clair qu'il faudra agir en dehors des heures de visite

(la porte du musée n'est protégée que par un ridicule cadenas à 1 euro 50.), quitte à prendre une cellule dans le bâtiment voisin... Auquel cas les bons moines se feront un devoir de donner aux PJs ce pour quoi ils ont payé : recueillement, dîner frugal dans le grand réfectoire (heureusement dans un bâtiment récent et extérieur à l'abbaye) Et... prière dans la chapelle historique !

Seuls dans l'exposition, les joueurs pourraient avoir la tentation d'arrondir leur fin de mois ou simplement de faire un peu de zèle en dérobant la statuette de sainte Foy.

Une bien mauvaise idée, car, véritable trésor, celle-ci est protégée par une alarme. Pour finir, le fait de prendre les reliques en main provoquera des sortes de brûlures très désagréables qui pourront engendrer des malus en dextérité le temps d'une guérison.

Le saint prépuce du Christ

La mauvaise idée

Un épisode apocryphe, chastement évincé des récits bibliques officiels en 1214 par le pape Innocent III, relate la circoncision du Christ. Etait-ce par excès de pruderie ? Ou bien tout simplement parce que la scène manquait un tantinet du sacré qui sied à l'église ? Il est vrai que le fils de dieu se faisant dégoupiller le bout de la bite, à l'heure des croisades, cela faisait un peu désordre. L'épisode fut donc occulté, et le souvenir du petit bout de peau sacré, oublié.

Par quels truchements l'" objet " se trouva exposé dans un minuscule aquarium de cristal et de verre renforcé enchâssé dans dix bons kilos de métaux précieux outrageusement décorés ? Mystère ! Le fait est qu'au XIVème siècle, un moine de Pampelune prétendit avoir reçu la puissante relique des mains de l'archange Gabriel afin que cette dernière soit préservée dans la chapelle de San Jesucristo, actuellement dans la cathédrale Santa Maria de Pampelune.

Si certains hommes de foi contestent cette version des faits, aucun d'entre eux n'aurait le mauvais goût d'en contester l'authenticité.

Le doute n'étant à ce point envisageable qu'il n'est pas même question d'envisager une analyse au carbone 14... Vous pensez, ce serait gâcher.

Fait étrange, une analyse au carbone révélerait que la relique date bien de l'an 0 !

Mais une analyse ADN apprendrait au monde entier qu'elle appartient en fait à l'âne gris voisin d'étable du jeune Jésus.

Pour tout dire, l'apparition mystérieuse de cette relique est le fait du facétieux Kobal, prince de l'humour noir qui, s'étant collé une paire d'ailes dans le dos était allé voir le bon moine pour lui faire ce cadeau. Eu égard à la chute désastreuse de sa blague, Kobal n'a jamais songé à se vanter, il serait même assez marri qu'on puisse découvrir la vérité et remonter jusqu'à lui. En effet, dès l'apparition de la relique, l'église, loin d'être désacralisée s'est trouvé investie d'une puissance divine renouvelée, d'autant plus grande que la ferveur des croyants était décuplée...

On comprendra que, bien que ne comprenant pas d'où la relique pouvait provenir, personne dans le camp adverse n'eut la fâcheuse idée de prétendre à rétablir une quelconque vérité, ni d'ailleurs à la chercher, cette vérité.

Mais pour ce qui concerne nos démons, la seule préoccupation est de savoir comment dérober la relique et la remplacer par une fausse. Sachant qu'il est impossible à des démons de rentrer dans une église aussi sainte sans être désintégrés dans la seconde, que la nature divine de la relique risque d'avoir les mêmes conséquences pour le démon moyen, que la statue d'or et d'ivoire qui abrite les saints restes doit bien peser ses cinquante kilos et qu'elle est surprotégée...

Le seul moment pour agir est la fête des reliques, où les fidèles entrent en procession et promènent toutes les reliques de la ville à travers les rues étroites du vieux Pampelune. Cette manifestation a justement lieu... Demain. Gilg A tout prévu : les PJs portant toge, capuches et croix, feront partie d'un faux cortège qui devra rencontrer le vrai, profiter de la confusion pour s'emparer de la relique et disparaître le plus discrètement possible... Mais les choses ne se passent jamais comme prévu.

Les PJs seront d'abord retardés en route par un accident de taureau ainsi que par la horde de fanatiques désirant toucher la relique. Il leur faudra alors hâter le pas, quitte à courir, pour rattraper le temps perdu, et ce au milieu d'une horde de croyants. Arrivant à temps pour heurter le vrai cortège, ils devront profiter de la confusion pour échanger les palanquins...

Et ramer à contre-courant pour ne pas être emportés vers la très sainte église à deux pas de là et vers laquelle le palanquin s'en retournait gentiment pour se reposer jusqu'à l'année prochaine. Au passage, si un des joueurs, pris de folie, tente de s'emparer de la relique malgré le danger, il sera très étonné de n'être pas affecté par elle !

Epilogue

Après ce dernier épisode on aura compris que la puissance des reliques ne dépend pas uniquement de leur authenticité mais aussi, et beaucoup, de la ferveur des croyants. De fait, les actes de désacralisation n'ont de validité que s'ils ne sont pas secrets. Pour qu'il y ait désacralisation, il faut que les fidèles en aient conscience...

En particulier, la réussite du dernier épisode n'aura que peu d'incidence sur la sainteté de l'église. Par contre, il est probable que le peu de sainteté de la relique volée attire l'attention de Gilg et qu'il remonte jusqu'à Kobal. Tentant de le faire chanter, il se fera tirer les oreilles et prétendra agir sous la contrainte des PJs... Quelle que soit la manière dont les joueurs se démènent, ils ne pourront nier être ceux qui ont amené le scandale au grand jour. Kobal en concevra une haine farouche à leur égard.

En fait, le mieux serait que l'opération soit un fiasco. Si la relique venait à être enlevée sans être remplacée, ce serait une catastrophe pour l'église. Si en outre la vraie relique pouvait être perdue ou mieux, détruite, un admirateur secret pourrait même vouloir du bien aux joueurs.

Quoi qu'il en soit, à la fin de cette aventure Gilg fera tout pour tirer la couverture à lui. En outre, quelle que soit la manière dont les choses évoluent, en bon démon, Gilg dénoncera anonymement les joueurs sur la foi de ses fausses preuves, et n'hésitera pas à y ajouter les inévitables couacs de cette histoire.

Avec un peu de travail il est aussi possible d'envisager ce scénario sous la forme d'un pèlerinage à Compostelle, vos démons étant chargés d'en désacraliser les étapes.