Scénario


Pour : In Nomine Satanis/Magna Veritas


Auteur(s) :

Mario HEIMBURGER

Benjamin SCHWARZ

Illustrateurs(s) :

Benjamin SCHWARZ


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Eastenwest > 10 - Leçon des cloches



Cannes, dernière !

Des âmes sont en danger ? Pas de problèmes, les anges sont là… ce scénario pour un petit groupe plutôt subtil (Ahem…) va mener les joueurs dans le sud de la France, dans la ville passionnante de Cannes.
Une tragi-comédie en quatre actes pour Magna Veritas.

PROLOGUE

Décor : la guérite du gardien, paradis. Dans un coin, un ordinateur allumé, deux individus en grande discussion. Près de la porte, scrutant nerveusement le portail, un troisième homme attend sans rien dire.

Jean : Si je te le dis. Regarde, les liaisons sont correctes et la requête aussi. Y'a pas de problème, ici.
Yves : Jean, tu sais bien que ces trucs ne marchent jamais. Comment tu veux expliquer le problème autrement ?
Jean (se lève, énervé) : marche jamais, marche jamais ! Mais si vous autres assistiez un peu plus aux formations, vous sauriez comment les faire marcher ! Bon, je récapitule. Requête " Arrivage ". Facteur temps : la dernière semaine. Localisation d'origine : Cannes et sa région. Je clique sur valider… là ! les mêmes résultats…
Yves (commence à être franchement soucieux) : donc, tu es en train de m'expliquer qu'environ la moitié des âmes de Cannes, libérées la dernière semaine se sont perdues sur les voies du paradis ?
(Soudainement gêné…).
Mmh… tu pourrais faire la même requête, mais avec le facteur temps " la semaine à venir " ?
Jean (bricolant sur l'ordinateur) : Voilà, cinq personnes attend…
Yves (le coupant) : nom de Lui de nom de Lui…. Faut arrêter les bêtises, maintenant. Je vais voir où sont passées toutes ces âmes…
Jean : En tous cas, ça vient pas de la base. Tu as vérifié au sous-sol ?
Yves (se dirigeant vers la sortie) : non, pas encore… mais ce serait une violation manifeste du traité.
Jean (l'accompagnant) : ce serait pas la première fois, non ?
(les deux archanges s'éloignent vers l'arrêt de nuage le plus proche et disparaissent dans la brume éternelle. L'homme resté silencieux reprend sa place, désœuvré, devant l'ordinateur).
Saint Pierre : bon, et je fais quoi, moi, maintenant ?

MISE EN BOUCHE : ON VA A CANNES, ON VA A CANNES…

3 octobre 2000. Quel que soit l'endroit où se trouvent les personnages, une petite convocation leur parvient sous la forme d'un élégant petit carton d'invitation portant les armes d'un grand hôtel cannois : le Martinez. Une écriture parfaite et nette la recouvre :

" Mes amis,
une nouvelle occasion de servir le Seigneur vous attend. Vous êtes priés de vous rendre pour un dîner " d'affaire " au restaurant " La Palme d'or " de l'hôtel Martinez afin que nous puissions en parler tranquillement. Le moment du rendez-vous est fixé au 4 octobre, à 20 heures. Soyez ponctuels, je vous prie.
Yves "

Certainement surpris de recevoir une convocation provenant de l'archange des Sources lui-même, les personnages auraient toutefois une bien mauvaise idée de ne pas se présenter au rendez-vous, tant sont connus ses relations très proches avec Dieu le père lui-même. C'est donc le cœur lourd d'appréhension que chacun de son côté va prendre la route du Sud…

A Cannes, les personnages n'auront aucun mal à repérer l'hôtel Martinez… il faut dire que c'est un établissement de luxe connu de tous, situé sur le front de mer et disposant d'une belle plage privée. Mais ce luxe prohibitif pourrait bien être le premier défi pour les joueurs, car compte-tenu du look généralement très… particulier des personnages, il leur faudra passer un premier service d'ordre assez strict avec la tenue vestimentaire. Si la situation venait à dégénérer avec le maître d'hôtel (un individu qui semble être le clone réel des croque-morts de Lucky Luke), Yves serait forcé d'intervenir pour calmer le jeu, ce qui serait assurément un mauvais départ pour l'aventure.

Quoi qu'il en soit, vos personnages finiront bien par prendre place à la table où Yves, ne pouvant attendre et profitant de son bref séjour, est en train de déguster un des nombreux plats gastronomiques dans un cadre esthétique où les portraits des stars du 7ème art semblent couver amicalement les convives. Evidemment, il n'est pas question d'inviter les anges, qui seraient inspirés de regarder les prix avant de commander à manger…

Après un préambule vide de contenu et des banalités qui n'intéressent que l'archange des Sources, Yves en vient au point essentiel : la nouvelle mission des personnages.

Elle se résume en trois phrases : jusqu'au 4 octobre au soir, les anges doivent protéger une charmante petite retraitée du nom d'Amélie Grandvoisin. A partir du 5 octobre, la personne à protéger change : il s'agira de l'actrice archi-connue Brigitte Cajot. Cette seconde protection se poursuivra jusqu'au 6 à 19 heures, à partir de là, les personnages devront faire un rapport à Yves au même endroit.

Evidemment, les adresses de ces deux personnes sont fournies par Yves, ainsi qu'un (maigre) dossier sur les cibles, visiblement censuré. Yves ne lâchera pas grand chose de plus, et ceci pour deux raisons. La première : certaines des questions des personnages appelleront forcément la réponse " je ne sais pas ", chose que l'archange ne peut admettre. La seconde raison est encore moins avouable : Yves veut tout faire pour que l'âme de Brigitte Cajot arrive au Paradis, mais ne veut pas dire pourquoi. Pour noyer le poisson, il fait protéger une deuxième personne avant, mais se moque presque de son devenir.

Les joueurs ne le savent évidemment pas, mais ces deux personnes sont appelées à mourir dans la semaine, quoi que fassent les personnages. Yves craint que leurs âmes s'égarent comme une dizaine d'autres personnes âgées de Cannes dans les semaines précédentes.

Si les PJs manœuvrent bien, Yves finira par avouer qu'il craint (il " sait ") qu'un danger menace ces deux personnes et veut leur adjoindre des " gardes du corps " angéliques afin d'écarter tout risque. Le reste ne concerne pas les anges… mais il saura se montrer intraitable si les événements ne se déroulent pas comme prévu.
Cette menace devrait être prise très au sérieux, même si les joueurs ignorent pour le moment ce qui est prévu au juste…
La mission commence immédiatement… après l'addition !

ACTE I : PREMIERES ARMES

Amélie Grandvoisin est une charmante dame de 76 ans. Plutôt grande et osseuse, elle est aimée de tous les enfants de son immeuble HLM du nord de Cannes. Enfin, du moins, de ceux qui ont échappé à son pit-bull, à tous les pièges qu'elle tend dans son désœuvrement de retraitée seule et aux mesquineries qui frappent tous ceux qui ont l'heurt de lui déplaire à un moment ou à un autre. Une chose ne lui fait en effet pas défaut : la mémoire. Entraînée par tous les jeux télévisés ainsi que par les mots croisés de tous les magazines télé qu'elle accumule dans son deux pièces, elle n'oublie jamais une contrariété, mais a une faculté spéciale pour oublier tous les bons côtés de la vie. Cette sympathique vieille femme est donc la première des deux personnes que les anges doivent protéger… et c'est pas gagné !

Activités nocturnes

Si les personnages commencent leur surveillance de nuit (comment ? vos joueurs respectent les ordres de leurs supérieurs ?), ils pourront assister à un drôle de manège. Vers une heure du matin, en effet, la lumière s'allume dans la cage d'escalier centrale de l'immeuble, et Mme Grandvoisin quitte son appartement du cinquième en pantoufles et robe de chambre, armée d'un seul cabas.
Au bas de l'immeuble, un groupe de banlieusards squattent les marches de l'immeuble en écoutant du rap et en se passant des pétards en riant bêtement. Malgré ce rire ridicule, on les devine quand même armés et habitués aux bagarres et autres escarmouches de quartier…
Une simple association de faits pourrait faire tilter les joueurs, mais paradoxalement, il n'y a rien à craindre pour la petite vieille : Amélie descend tranquillement les étages, semant quelques punaises sur les paillassons de certains appartements, et finit par sortir par la grande porte de l'immeuble.
Se faisant légèrement chambrer par les voyous (les personnages vont-ils intervenir ?), elle leur sourit benoîtement et extirpe de son sac à main quelques bonbons qu'elle distribue aux jeunes complètement ébahis, qui les acceptent avec un air gêné en se regardant sans rien comprendre. Leurs rires nerveux se transforment en sourires polis : qui pourrait faire du mal à une petite vieille ?
Amélie remonte alors tranquillement dans son appartement et finit par s'endormir.
(Evidemment, si les personnages sont intervenus, les événements ont été changés. Ce qui est important, c'est qu'Amélie termine la nuit tranquillement dans son appartement et que les personnages n'y soient pas encore rentrés.)

Matin gris…

Si les personnages se sont tenus en alerte toute la nuit ou s'ils n'arrivent qu'au petit matin, ils vont avoir la surprise de voir arriver dans la cité une série d'ambulances. Des hommes un peu craintifs en sortent et rentrent dans différents immeubles (ils ont l'habitude de recevoir des jets de pierre, et sont donc assez circonspects).
Assez rapidement, l'un d'eux descend chercher un brancard et bientôt, un jeune homme est évacué d'urgence pour un lavage d'estomac à l'hôpital. La même scène se répète à plusieurs endroits, c'est la valse des ambulances.
Des joueurs plus futés que la moyenne (et qui auront assisté aux événements de la nuit) comprendront rapidement que les bonbons de la brave Amélie étaient empoisonnés : ce sont en effet les mêmes sauvageons qui sont évacués vers les hôpitaux !
Leur vision de la brave Mme Grandvoisin devrait en être affectée !

La vieille quitte son appartement vers 9 heures pour aller chercher son pain à la boulangerie du Super U voisin et en emmenant son chien se promener (il s'appelle Jésus, pour changer, et est un magnifique pit-bull qui fait très peur, même à des anges. Si le fils de Dieu savait que ce chien porte son nom, il changerait certainement de nom pour ne pas le contrarier…)
Puis, fidèle aux habitudes des petits vieux sans activités, elle ressortira vers 11h45 pour faire ses courses, juste avant le roulement des caissières, au moment où tous les travailleurs font des courses rapides durant leur pause.

Durant toute la matinée, une surveillance du quartier mènera à une conclusion inquiétante : les quelques rescapés de la veille ont vite fait le rapprochement entre les bonbons et l'état déplorable de leurs amis. Un peu partout, des groupes de jeunes se passent le mot, et rassemblent battes de base-ball, nunchakus et armes à feu.
Si les anges parviennent à s'approcher assez prêt d'un de ces groupes, il deviendra évident qu'ils ont l'intention de donner une bonne leçon à la vieille, en saccageant son appartement, en tuant Jésus (sacrilège ! Euh… non, finalement pas) et peut-être pire.

Les voies d'Yves sont aussi impénétrables que celles du chef… la protection d'Amélie risque de devenir difficile en fin d'après-midi. La conclusion devrait s'imposer d'elle-même : il faut soustraire mâme Grandvoisin à ses ennemis.

Malheureusement, une rapide tournée du voisinage leur apprend qu'Amélie ne sort que le matin, et en début de soirée pour sortir le chien… Il va donc falloir pénétrer dans son appartement pour sauver la vieille dame.

Opération " Extraction bancale "

L'opération va bien sûr s'avérer plus difficile que prévue, car il est temps de vous révéler (en partie) la vérité… Cela fait environ trois semaines que Jésus n'est plus le même. D'adorable chien-chien à sa mémère, il est devenu un véritable démon. Ou plutôt, un familier, placé là pour surveiller l'état d'Amélie et accélérer sa mort.
Encore un peu de patience, vous saurez bientôt pourquoi ! Toujours est-il que Jésus n'a qu'un seul objectif : pousser un peu plus le penchant naturel de sa maîtresse à des mesquineries et la fait ainsi haïr de tout le monde. Il espère qu'une justice interne finira par la tuer et faire passer la vieille dame comme une victime de la haine ordinaire. Ensuite, il sera libre de retourner auprès de son vrai maître (ou de faire un tour avant, parce que bon…).

L'intervention des personnages va le forcer à changer légèrement ses plans : il va devoir tuer lui-même la brave dame et espérer que tout naturellement, ce seront les personnages qui porteront le chapeau. Il ne fera ainsi qu'en dernier recours, restant près de sa maîtresse juste pour pouvoir agir plus rapidement…
De toute façon, les anges auront déjà assez à faire avec l'appartement de Mme Grandvoisin…

Se sachant (ou se croyant) détestée, elle a développé une réelle paranoïa qui l'a poussée à piéger son propre appartement. Ses pièges sont grossiers, et ne demandent généralement qu'un peu d'observation pour être déjoués, mais si les anges sont un peu trop bourrins (ou pressés par une foule en colère qui commencerait à monter l'escalier…), ils risquent fort de les subir…

L'appartement est un simple deux pièces (voir plan). Tout semble y être ancien et triste : la tapisserie est vert sombre (décorée de fleurs qu'on dirait fanées), les meubles sont de grosses pièces en bois ancien (mais sans aucune valeur marchande, un mobilier rustique et trop classique), le sol est recouvert de linoleum usé et de vieux tapis ternes. Bref, un véritable appartement de vieux, avec une luminosité poisseuse que laissent filtrer des rideaux trop épais aux fenêtres…

Quelques exemples de pièges domestiques (mais n'hésitez pas à en inventer d'autres…)
- au niveau de l'interrupteur du vestibule (côté porte), les fils sont dénudés (il faut utiliser l'interrupteur côté salon pour allumer la lumière).
- un manche à balais est posé en travers de la porte du salon
- un petit tapis à l'entrée du salon repose sur un morceau de linoleum rendu volontairement glissant. Poser le pied dessus correspond à une chute garantie.
- Des poufs sont posés en travers du chemin pour entraver une éventuelle course.
- L'armoire du salon est instable et ne s'ouvre pas normalement. Tirer sur la poignée la fait tomber sur soi. En fait, seule la porte de gauche (la moins intuitive) peut s'ouvrir.
- Les poufs contiennent un produit anti-insectes particulièrement violent (un remède de grand-mère). Les piétiner amène tous les personnages présents à tousser violemment (-1 colonne à toutes les actions pendant 10 rounds).
- Du papier tue-mouche est accroché en des endroits stratégiques (passages de portes, à proximité des interrupteurs, etc.).
- La poignée de la porte de la chambre est reliée à un système de sirène qu'Amélie s'est fait installer récemment par un électricien peu scrupuleux. La toucher quand la porte est fermée (c'est évidemment le cas quand les PJs arrivent) déclenche la sirène sans autre effet notable que d'exploser pratiquement les tympans de la victime (-2 colonnes au jets d'audition durant les 48 heures suivantes).

Si vous jouez bien cette scène, vous devriez accumuler les catastrophes pour vos personnages, jusqu'à ce qu'ils deviennent eux-mêmes paranoïaques. Tout porte à croire qu'Amélie est prête à soutenir un siège. En fait, il n'en est rien.

Après le piège de l'alarme, les personnages découvrent la chambre de la vieille dame, impeccablement rangée. Amélie est couchée sur le lit, la télévision est allumée sur un quelconque jeu télévisé (consultez le programme télévisé pour en connaître le titre en fonction de l'heure d'arrivée des personnages). Si les personnages pensent à le demander, Jésus est invisible.

Dès que les personnages entrent dans la pièce, Jésus déclenche son pouvoir " Onde de Choc " au niveau +1. Le chien se trouvant sous le lit au moment du déclenchement, le meuble et son auguste contenu est immédiatement projeté en l'air tandis que l'onde de choc chamboule toute la pièce, y compris les personnages.
Jésus parvient ensuite sans peine à esquiver le lit qui retombe après s'être retourné, et n'aura plus qu'un seul objectif : fuir.

Entre nous, ami meneur : le devenir de Jésus n'a que peu d'importance pour la suite du scénario. Le combat qui s'ensuit peut donc être géré à l'avantage net des joueurs. Cela leur fera une piètre consolation : lorsque le calme revient, il ne reste plus qu'à extirper le cadavre de sous les débris du lit.
Il est peu probable que les personnages aient le temps de fouiller l'appartement, mais pour le cas où une idée de génie les frapperait, sachez que la seule chose intéressante dans la chambre d'Amélie est un livre de comptes où elle note soigneusement dépenses et entrées… A ce stade, il ne servira à rien, mais plus tard, peut-être…

Jésus, Familier au service de Kolvyn
AG : 3 PR : 2 VO : 3
AP : 1 PE : 2 FO : 3

Talents : Mordre +1, Esquive +1
Pouvoirs : Onde de choc (+1), Non-détection (0)

Autre détail : à moins qu'ils n'aient placé un des leur pour faire le guet, ils vont se retrouver en sortant devant un groupe de jeunes armés et totalement médusés… Ils ont peut-être entendu les effets de l'onde de choc, et ne comprennent pas ce qui s'est passé.
Quoi qu'il en soit, les anges devraient s'en sortir sans trop de problèmes, mais leur signalement sera peut-être transmis à la police…

ACTE II : RECOUVREMENT

Les personnages ont certainement l'impression d'avoir essuyé un cuisant échec, et c'est bien normal… mais dans tous les cas, ils n'auraient pas pu sauver la vie d'Amélie : c'était écrit, comme dirait l'autre…
De plus, cette première affaire soulève quelques questions : que faisait ce familier avec une vieille dame des cités ? Quel était son objectif et à qui obéissait-il ? Dans tous les cas, les réponses ne sont pas évidentes à ce stade de l'aventure, et les personnages ne peuvent faire autrement que de poursuivre leur mission en redoublant de zèle. De quoi faire progresser la paranoïa naturelle des joueurs d'un cran !

Brigitte Cajot

Qui ne connaît pas Brigitte Cajot ? Enfin, à part les moins de trente ans, bien sûr… Actrice mythique dans les années 70, oubliées dans les années 80 et vieillissante dans les années 2000, elle pense encore être une célébrité de nos jours, mais n'apparaît dans les magazines qu'à cause de ses prises de positions tendancieuses sur la politique mondiale…
Toujours persuadée que le festival de Cannes reconnaîtra un jour publiquement son talent (dont plus personne ne se souvient vraiment), elle a acheté voilà cinq ans une grande villa située sur l'avenue Jean de Noailles.
Depuis, devenue presque grabataire, elle attend sa nouvelle heure de gloire qui ne viendra probablement jamais, passant ses journées en fauteuil roulant, s'occupant de ses deux bergers allemands (Roger et Serge), profitant de sa richesse évanescente en compagnie de ses trois gardes du corps, accessoire indissociable de la célébrité.

C'est dans ce contexte de luxe et de suranné que les personnages vont devoir effectuer la seconde partie de leur mission…

Prélude à la catastrophe

Là encore, quelques événements vont précéder l'arrivée des personnages (ou peut-être pas, en fonction de l'empressement qu'ils mettront à poursuivre la mission).
La nouvelle de la mort d'Amélie arrive assez vite aux oreilles de ceux qui sont responsables de tout cela (encore un peu de patience, ou alors passez à l'intermède, plus loin, et revenez ici). Il devient évident que les personnages sont là pour leur mettre des bâtons dans les roues, et la décision est prise de précipiter un peu les événements.

Dans les heures qui suivent la mort de Mme Grandvoisin, une camionnette se présente devant l'entrée de service de la villa de Brigitte Cajot. Elle porte le logo du célèbre restaurant de la palme d'or que les personnages ont eu l'occasion de visiter, il n'y a pas si longtemps.
Un livreur ouvre les portières arrières, et en sort un paquet visiblement bien emballé, qu'il remet aux gardes du corps avant de repartir. (Si les personnages ont la bonne idée de suivre le livreur, vous trouverez les informations de mise en scène dans la partie " Enquête post-mortem ", plus loin dans ce chapitre).
Des personnages soucieux imagineront sans doute un complot à base de plats empoisonnés, mais un rapide coup d'œil montrera que le garde du corps ne se dirige pas vers la villa même, mais vers une autre bâtisse (visiblement destinée à un éventuel gardien) où il va déposer les aliments.
A côté de la maison, deux chiens aboient paresseusement au passage du garde, depuis un chenil attenant.

Evidemment, tous ces éléments vont mettre la puce à l'oreille des joueurs (s'ils en sont les témoins). Peut-être même se décideront-ils à tuer les chiens par crainte d'un retour de Jésus ou d'une de ses incarnations (!). Mais le vrai danger est bien multiple.
En effet, cela fait plusieurs jours que le fauteuil roulant de la brave mâme Cajot a été piégé (lors de sa dernière réparation)… mais nous verrons plus tard les effets dévastateurs de ce piège.
En attendant, il faut surtout expliquer les effets de la nourriture apportée : elle est destinée aux gardes du corps, et contient une drogue qui rendra les gardes légèrement inopérants, les empêchant de réagir lorsque le moment sera venu.

Voilà pour le prélude… la mise à mort commencera réellement le lendemain.

Promenade en ville

Le lendemain matin, Brigitte Cajot va se permettre un de ses rares plaisirs quotidiens : se promener avec ses deux chiens. Vers 9 heures du matin, après un solide petit déjeuner, un étrange cortège se dirige vers la sortie de la propriété : un premier garde du corps, suivi des deux chiens tenus en laisse par la vieille actrice en fauteuil roulant, que pousse un second garde du corps. Le dernier homme fort ferme la marche.
L'étrange groupe va commencer à suivre le trottoir le long d'une promenade familière, si on en juge par les saluts aimables des voisins et des passants. Le cortège se dirige tranquillement vers les quartiers commerçants voisins.
Autour de Brigitte Cajot, les gardes du corps montrent des signes de faiblesse. Ils titubent légèrement, regardent paresseusement autour d'eux et semblent avoir de nombreuses heures de sommeil à récupérer. Cela semblera peut-être suffisamment suspect aux joueurs pour avoir envie d'intervenir.
Au moment où les personnages se décident à intervenir, le fauteuil roulant fait littéralement un bond en avant, s'arrachant des mains du conducteur. Le garde du corps à l'avant n'a pas le temps de réagir, déjà le fauteuil et son bestial harnachement (les chiens, s'ils n'ont pas été tués ont été assez effrayés par le bond pour se lancer eux-mêmes dans une cavale infernale) dévale la pente en direction du centre-ville. La pauvre actrice, dont le bras droit est retenu à la laisse et le bras gauche s'agrippe avec l'énergie du désespoir au fauteuil n'est pas en mesure d'actionner le frein, qui se trouve justement du côté droit de sa chaise roulante !

En fait, le fauteuil est commandé depuis une voiture garée plus loin sur la route, grâce à un mécanisme installé lors de la réparation.

La suite est du domaine du burlesque, et ce sera à vous meneur, de le mettre en scène de façon dynamique. La poursuite risque de durer, et de rencontrer de nombreux obstacles que les personnages devront déjouer s'ils veulent maintenir Brigitte en vie.
Ils vont de plus avoir affaire aux gardes du corps, complètement paniqués, qui verront d'un œil suspect un groupe d'inconnus courir après le fauteuil.
Voici une liste d'éléments pour agrémenter la poursuite, introduisant également de nombreux clichés. Sachez simplement que la villa de Brigitte Cajot se trouve sur une colline et qu'il n'y a que de la descente jusqu'au boulevard du midi, équivalent à la Croisette, mais côté ouest de la ville…
- en contrebas, deux individus en imperméable et à l'air louche semblent attendre le cortège. Les joueurs vont-ils intervenir ? Si oui, tant pis pour les deux joueurs de " Killer ", ils n'avaient qu'à pas jouer à un jeu démodé en plein centre-ville…
- les deux chiens font une brusque embardée, dirigeant le fauteuil sur le mauvais côté de la route, là où la circulation est en sens inverse. Les véhicules devenus incontrôlables foncent vers les personnages.
- Si un personnage a réussi à prendre de l'avance sur le cortège fou (en prenant une rue parallèle), il pourra constater qu'au bas de la pente, des ouvriers sont en train de poser du macadam frais sur la chaussée, à l'aide d'un rouleau-compresseur… quid de la rencontre entre un fauteuil roulant et l'engin ?
- Pris en chasse par des motards de la police, les personnages vont avoir du mal à expliquer qu'ils ne sont pas en train de courser une vieille.
- Enfin, arrivée sur le boulevard du midi, le fauteuil poursuit sa route vers le vieux port, qui sera certainement le terminus du voyage…

Quoi qu'il en soit, l'actrice ne hurle pas longtemps… coincée dans son fauteuil, roulant à grande vitesse, elle subit très rapidement une attaque cardiaque qui la crispe encore davantage dans sa position inconfortable.

A noter que si les personnages arrivent à stopper le fauteuil, des coups de feu proviendront d'une voiture garée à proximité en leur direction, juste avant qu'elle ne démarre sur les chapeaux de roues. Les personnages peuvent avoir le temps de repérer le numéro d'immatriculation du véhicule, mais en aucun cas l'arrêter.

Dans tous les cas, les anges devraient être bien ennuyés d'avoir apparemment échoué dans leur mission. Ils peuvent soit attendre jusqu'au lendemain pour faire leur rapport (suicidaire) ou prendre les devants en tentant d'apporter des réponses à cette vague de morts. Ils feraient mieux d'ailleurs de poursuivre l'enquête…

Gardes du corps (3)
AG : 2 PR : 2 VO : 1
AP : 2 PE : 2 FO : 2
Talents : Esquive 0, Armes de poing (+1), Corps à corps (+1)

Enquête post-mortem

Dans ce cas précis, il y aura nettement plus d'indices à trouver pour tenter de comprendre ce qui se passe.
- auprès des gardes du corps survivants : les joueurs peuvent apprendre que le livreur du restaurant de la palme d'or est depuis plus d'un mois le même, un jeune étudiant qui travaille le soir au grand hôtel sur recommandation de son père. L'étudiant s'appelle Albert E. Davidson, et s'est lié de sympathie avec la vieille actrice (ils discutaient souvent avec elle, et son entrée en matière générale était " je vois à votre forme que nous allons avoir des problèmes financiers ! ", suite à quoi ils éclataient tous les deux de rire. Les gardes du corps n'ont jamais rien compris à cette blague et n'ont d'ailleurs pas cherché à comprendre. Les gardes ajoutent qu'à part Albert E. Davidson, elle ne reconnaissait plus personne.
- Concernant la réparation du fauteuil, les gardes peuvent attester une intervention récente sur cet équipement, réalisée par le même Albert E. Davidson (" pour rendre service : le fauteuil couinait ", dixit les gardes du corps) quelques jours avant le drame.
- Dans la maison, en fouillant bien, les personnages peuvent retrouver le journal intime de Brigitte Cajot (qu'elle tenait dans la ferme intention de le publier un jour, ce qui rend le style ampoulé, surfait et faussement introspectif). Dans les dernières pages, d'une écriture tremblante à peine lisible (mais rien de suspect là-dedans), l'actrice se pose beaucoup de questions sur ce qu'elle lèguera au monde lorsqu'elle mourra. Elle indique qu'elle a fait en sorte d'aider les pauvres grâce à une société d'assurance qui décuplera sa fortune à sa mort. Par testament, tout reviendra à la SPA voisine, car " plus on connaît les hommes, plus on aime ses chiens ". Elle ne précise pas dans le journal qu'elle a volé cette citation à Desproges.
- Dans les papiers administratifs, si les personnages ont le temps de les dépouiller, ils peuvent se rendre compte de la souscription le 5 septembre d'une police d'assurance-vie auprès de la société " Ecosûr ". Le contrat est toutefois d'un genre particulier : un contrat de délégation, portant les logos conjoints de la société " Ecosûr " et un autre sous-titré " ECREME ". Un examen plus attentif permet de se rendre compte que les signatures au bas du contrat sont d'une couleur marron/rouge, assez inhabituelle.
- Si les personnages pensent à regarder dans le classeur financier d'Amélie Grandvoisin (s'ils ont pensé ou eu la chance de l'emmener), ils ne trouveront pas de traces similaires. Un achat pour un système d'alarme perfectionné de la société " Protech Systems ". Un retour à l'appartement d'Amélie (où il faudra briser les scellés) permettra de remettre la main sur un contrat d'achat également signé de la même couleur, mais pas par les même signataires.
- Si des personnages ont des contacts à la police, ils pourront apprendre que le véhicule dont ils ont repéré l'immatriculation appartient à une école de commerce, l'ECREME, mais qu'il a été déclaré volé dans la matinée. D'ailleurs, on retrouvera le véhicule en fin d'après-midi, calciné, avec ses occupants : deux jeunes étudiants de la même école. La cause de l'incendie est imprécise.

Enfin, interroger Albert E. Davidson est une riche idée, facile à réaliser : il continue à effectuer des travaux de livraison tous les soirs au Martinez et ses restaurants.
Albert est l'archétype même du jeune winner : fils d'un homme d'affaire anglais, grand et mince, un brushing impeccable, une présentation sérieuse et souriante (bien qu'un peu crispée) et une diction précise.
Il ne sera même pas nécessaire de le terroriser : il n'a pas vraiment la conscience tranquille et sera prêt à raconter toute son histoire…
Un groupe d'étudiants de son école (l'ECREME), qui s'appellent entre eux " les requins ", l'ont pris à parti et l'ont menacé de révéler son homosexualité s'il refusait de leur rendre un petit service : droguer les repas qu'il livrait à Brigitte Cajot et trafiquer le fauteuil roulant " pour faire une petite farce ". Sur le moment, cela ne paraissait pas très grave, et valait bien le silence de ce groupe… mais par la suite, la conscience de Davidson le taraudait beaucoup, d'autant plus qu'il aimait vraiment la vieille actrice…
Il pourra également expliquer la boutade que les gardes n'ont pas comprise : lui ayant vendu une police d'assurance durant son stage d'été qui vient de s'achever, il voulait flatter la vieille sur son état de santé impeccable qui ruinerait la société Ecosûr…
Il suppliera les personnages de ne rien lui faire, pleurant toutes les larmes de son corps, s'humiliant totalement. En fait, il a tellement peur que ça en devient gênant. Des anges au grand cœur le laisseront partir avec un petit sermon, comprenant rapidement que les grands poissons sont ailleurs (au passage, un " détection du mal " ne révèlera rien : Joachim est un humain de base, presque innocent).

En remontant cette piste, les personnages devraient tôt ou tard finir par arriver jusqu'à l'ECREME…

 

INTERMEDE : MAIS QU'EST-CE QU'IL SE PASSE T-IL DONC ?

Avant de poursuivre plus loin, il est temps de vous expliquer, à vous, meneur, ce que les joueurs ne comprendront peut-être jamais.

Le traitement des âmes au paradis est une activité très importante, parce qu'elle sert surtout à compter les points. Il existe trois catégories d'âmes : les pures, qui vont directement au paradis et qui comptent pour 1 point pour les forces du bien et les noires, qui renforcent le score des forces du mal.
Malheureusement, une bulle médiévale passée en douce quand les forces du mal étaient occupées ailleurs a instauré une troisième catégorie : les âmes qui ont quelque chose à se reprocher. Celles-ci sont envoyées au purgatoire pour y être lavées, et rejoignent ainsi au bout d'un temps variable la catégorie des âmes pures.
Cela fait donc longtemps que le score des forces de Dieu reste supérieur à celui des forces de Satan, au grand désespoir des fonctionnaires de ce dernier, qui doivent de plus, subir les quolibets de leurs collègues angéliques.
Dès lors, une mission " secondaire " a été transmise à tous les princes-démons : trouver un moyen de rétablir cette balance.

Chacun y est allé de sa petite idée expérimentale, jusqu'à ce que Kolvyn Hart, démon de Malphas eu l'idée d'exploiter une clause tombée en désuétude : si un individu signe de son sang un pacte vendant son âme au diable, même le purgatoire ne peut effacer ce pêché ! Malheureusement, depuis la grande vague de pactes des années 1870-1900, cette niche commerciale a été largement comblée par le rationalisme et les problèmes de voitures…

Mais l'arrivée du XXIème siècle a marqué un renouveau dans une autre activité, parallèle : l'arnaque. Il suffisait de coupler les deux intelligemment pour améliorer le quota d'âmes parvenant aux enfers.

Il aura fallu un an pour tout mettre en place dans une zone expérimentale : Cannes.
Deux problèmes durent être résolus progressivement. Tout d'abord, obtenir le sang des victimes. Pas de problèmes, Kolvyn plaça trois de ses familiers dans un laboratoire d'analyses médicales. Compte-tenu du nombre de retraités de Cannes, du nombre de check-up effectués chaque année et du peu de laboratoires opérant sur la ville, il couvrit tout le quartier nord et se constitua de minuscules réserves de sang.
Restait à faire signer les victimes… évidemment, impossible de leur faire signer consciemment un pacte vendant leur âme, mais qu'à cela ne tienne : il suffit de vendre n'importe quoi (une police d'assurance, un aspirateur, etc) et de rajouter des clauses en tout petit et en jargon juridique qu'un public crédule ne lirait jamais.
Et qui est plus crédule que des petits vieux ?

Utilisant son pouvoir d'influence, Kolvyn réussit rapidement à se hisser à la tête d'une école de commerce privée de la région, l'ECREME. Rapidement, il imposa de toutes nouvelles techniques d'enseignement, alliant pratique et théorie, manipulant les jeunes requins (pardon - étudiants) pour qu'ils effectuent la collecte d'âmes à sa place. Le piège était en place, il ne restait plus qu'à en récolter les fruits.

Bien sûr, Kolvyn aurait pu attendre tranquillement que les signataires meurent de leur belle mort… mais l'impatience du démon et son envie de réussir l'ont poussé à organiser des morts prématurées. De plus, il existe un moyen d'annuler le pacte : il suffit de détruire le pacte, et de prier pour sa propre âme, et le charme sera rompu…

Les personnages se sont donc retrouvés au milieu de ce complot, et ont une petite chance de se racheter pour éviter la colère d'Yves en démantelant ce réseau avant qu'il ne se généralise.
Dans le cas contraire, le scénario s'arrête là, et tous les anges écopent d'une limitation. Faut pas plaisanter avec le bras droit de Dieu, non plus !

Ah… une dernière chose : les âmes ne sont actuellement ni au paradis, ni au purgatoire, ni en enfer… Un trop gros arrivage en même temps attirerait trop l'attention. En attendant de pouvoir les passer discrètement en enfer, au compte-gouttes, le pacte précise que les âmes seront exilées dans une marche intermédiaire… il reste donc une chance de sauver les quelques âmes qui sont déjà tombées dans le piège, mais peut-être que les joueurs vont passer à côté !

 

ACTE III : L'ECOLE POUR LA REUSSITE MERCANTILE

Les quelques indices trouvés à l'acte II devraient mener les personnages à se poser des questions au sujet de l'ECREME. Cette école privée est située non loin de chez Brigitte Cajot, un magnifique bâtiment tout de métal et de verre construit, qui ressemble presque à une façade de la Scientologie ou à un bâtiment de Conseil Régional, mais en plus petit.
Son accès ne pose aucun problème : ni caméras, ni gardes. Après tout, il s'agit d'un établissement d'enseignement qui conduit à l'obtention d'un vrai diplôme, reconnu par l'Etat !

Méthodes d'enseignement

L'école forme chaque année une centaine de commerciaux. La sélection à l'entrée est drastique : le candidat doit posséder de l'argent, avoir de l'ambition et se déclarer prêt à faire tout ce qu'on lui demande dans le cadre de ses études.
De fait, il s'agit surtout d'enfants de bonne famille, qui ne demandent qu'un encadrement restreint de la part de l'équipe professorale, composée de 6 enseignants et d'une vingtaine de vacataires externes.

Dans le hall de l'ECREME, plusieurs sofas confortables sont disposés afin de permettre aux étudiants de se relaxer entre deux cours.
Sur un présentoir, à l'entrée, des prospectus annoncent la couleur : " Avec l'ECREME, obtenez le beurre et l'argent du beurre ".
Le prix d'inscription annuel est de 60 000 francs. Le prospectus (visiblement récent) vante les mérites du système d'enseignement. Tous les étudiants pratiquent la vente durant tout leur cursus, travaillant sur des missions confiées par des entreprises extérieures à la direction de l'école, qui les distribue ensuite en fonction des capacités et des secteurs des étudiants.
De ce fait, à tous les niveaux des études, l'étudiant allie théorie et pratique, selon des méthodes qui ont fait leurs preuves aux Etats-Unis.
Le mot du directeur met l'accent sur l'efficacité, le sérieux et surtout sur la réussite des étudiants. Il est signé Kolvyn Hart. Le prospectus se termine par une série de témoignages d'anciens étudiants, tous plus béats les uns que les autres.

DISCRETION OBLIGE
A noter que durant cette étape du scénario, les personnages feraient bien de se montrer très discrets et de se la jouer subtils. En effet, Kolvyn est sur le qui-vive. Certains de ses " requins " ont commis une grande imprudence le jour même, en agissant directement contre Brigitte Cajot (c'est ça, de faire confiance à des humains). Il n'a pas eu d'autre choix que de s'en débarrasser en faisant un exemple pour les autres. Du coup, il est sur les nerfs, prêt à tout laisser tomber s'il remarque encore une chose anormale.
Une rencontre suspecte, le vol de preuves matérielles ou du grabuge dans l'école suffiront à le faire fuir, emportant avec lui les pactes (s'ils sont encore en sa possession) et risquant ainsi de compromettre la libération des âmes.

Dans le hall, toujours, une série de portraits affichés sur une grande plaque de marbre, représentent d'anciens étudiants, devenus riches, qui aujourd'hui apportent de généreuses donations à l'établissement. Le tableau est titré " La crème de l'ECREME ".
Enfin, dernier détail qui frappe dans le hall d'entrée : l'annonce de la grande soirée d'intégration des nouveaux étudiants, qui aura lieu le soir même, et sera fêtée dans les locaux mêmes, sous la forme d'un grand bal costumé. Le thème ? Anges et démons…

Une ch'tite visite ?

Que ce soit en journée ou lors de la soirée intégration, les personnages auront peut-être l'occasion de se promener dans les locaux de l'établissement. Il va de soit que dans le premier cas, ils ont toutes les chances de se faire repérer, malgré l'absence de caméras de surveillance : les allées et venues dans les couloirs sont fréquents, ne serait-ce que de la part des étudiants. Faites en sorte que les personnages ne soient pas trop tranquilles durant leur visite, de manière à ce qu'ils participent effectivement à la soirée d'intégration… il y aura beaucoup plus d'ambiance.

Commençons par l'aile nord, qui est sans aucun doute la moins intéressante : elle contient, en plus des deux amphithéâtres (un de 150 places, équipé d'une régie audio-vidéo, et un autre de 75 places), les différentes salles de cours. L'une d'entre elle pourra toutefois attirer l'attention des joueurs : il s'agit d'une salle appelée " liaison fonctionnelle ". Hormis lorsque s'y déroulent des cours, elle est soigneusement fermée à clé.
L'intérieur de cette salle ressemble trait pour trait à un lieu de propagande pour sectes : des posters accrochés au mur vantent dans des slogans accrocheurs des techniques commerciales de " winner ". Ces techniques sont à la limite de la superstition et participent au maintien de la confiance en soi des étudiants (" Portez toujours votre caleçon porte-bonheur ", " Partez gagnant ", " Un stylo à plume pour chaque client à plumer ! "). Ce dernier slogan prendra tout son sens dans l'aile sud.

Cette dernière contient outre l'administration de l'école (secrétariat, comptabilité) et les bureaux des enseignants une salle de stockage technique et le bureau des stages.
Dans la section administration, rien de suspect, mais des papiers qui permettent de comprendre le fonctionnement de l'ECREME : deux années d'études, 60 étudiants en première année et 40 en deuxième. Toutes les périodes de vacances dans l'année sont consacrées à la mise en pratique des connaissances par l'intermédiaire de stages en collaboration avec les entreprises. Il s'agit généralement de prospections de marchés ou, pour les élèves les moins " techniques ", le démarchage en porte à porte pour le compte de sociétés.
Les bureaux des enseignants ne contiennent que des choses fort banales : des tonnes de papiers, un ordinateur avec des jeux, la photo des gamins en fond d'écran ou sur le bureau… et bien sûr un tableau d'affichage avec des conneries qu'on leur a envoyées par internet.

La salle de stockage se révèle par-contre passionnante : une grande armoire réfrigérée contient toute une série de stylos-plumes. L'examen attentif révèle une étiquette accrochée à chaque stylo, portant un nom. En cherchant bien dans un carton " en vrac " tout en bas, on peut trouver les stylos portant le nom d'Amélie Grandvoisin et Brigitte Cajot. Evidemment, tous les stylos contiennent du sang.
Dans la salle des archives, des boîtes d'archives contiennent les copies des contrats signés par les victimes. Une observation attentive permettra de se rendre compte qu'ils diffèrent des " originaux " retrouvés par exemple chez Amélie ou Brigitte : une petite bande en bas du contrat présente sous une apparence de frise un texte microscopique dans lequel le signataire engage son âme à sa mort en la donnant au diable. Le tout est écrit dans un français ancien (visiblement, le texte est sorti d'une très vieille jurisprudence démoniaque). Le texte précise que l'âme transitera par un " purgatoire inversé " avant d'être envoyé en enfer. Là encore, les contrats sont signés avec du sang.
Enfin, dernier lieu intéressant : le bureau du directeur contient une seule chose importante : des notes manuscrites qui expliquent comment ouvrir un passage dimensionnel vers une marche intermédiaire baptisée " Viager ". Ce rituel doit s'effectuer par le traçage au sol d'un pentacle et de symboles bien précis, puis par l'énoncé d'une formule rituelle à haute et intelligible voix :

" J'ai plus d'dents, j'ai plus d'force, j'suis vieux et fatigué, je veux mon viager ! "

La soirée d'intégration

Durant la journée, il sera très difficile de fouiller tranquillement l'école. Les secrétaires n'arrêtent pas de faire des allers-retour entre leurs bureaux et la machine à café, les enseignants draguent les étudiantes sur le pas des portes, les étudiants eux-mêmes ne cessent d'aller et venir. Bref, tous les moyens pour se faire repérer.
Le soir venu, il en sera tout autrement, par-contre : assez tôt, de nombreux étudiants arrivent, déguisés de la manière la plus obscène qui soit. De façon assez curieuse, la plupart des hommes viennent déguisés en anges (robe blanche, parfois un simple drap ou un pagne, auréole en carton fixé par une tige métallique souple, ailes en polystyrène dans le dos) tandis que les femmes sont déguisées en démones (bas résille, tenues rouges, cornes, maquillage outrancier, etc.). Bien sûr, il y a des exceptions, et certains étudiants jouent un peu plus le jeu que les autres.
Les amplis installés pour l'occasion dégueulent les derniers morceaux à la mode, alternant vieux rock-à-billy des années 60 avec des morceaux techno-indus de l'an 2000, en y intercalant de-ci de-là des vieux slows mielleusement écœurants.

Quasiment tous les étudiants sont là, et la soirée donnera lieu à de nombreux excès (n'hésitez pas à improviser : après tout, il s'agit d'une soirée d'intégration - comprenez bizutage - d'une " grande " école de commerce). Un " détection du mal " permettra de repérer plusieurs sources (les " requins ") mais la proximité des étudiants et leurs mouvements incessants ne permettront pas de les identifier facilement.
C'est le moment où jamais pour vos personnages de s'éclater, sans oublier pourquoi ils sont là. Mais tout comportement suspect (refuser de se plier à un bizutage, venir non déguisé, etc.) amènera immédiatement une surveillance d'un des " requins ". Si les personnages repérés s'éclipsent pour fouiller les locaux, ils risquent fort d'essuyer l'une ou l'autre escarmouche de la part des familiers.

Kolvyn Hart, démon de Malphas grade 1
AG : 3 PR : 2 VO : 5
AP : 2 PE : 4 FO : 2
Talents : Esquive 0, Baratin +1, Discussion +2, Séduction +1, Discrétion +1, Commerce +1, Armes de poing 0, Corps à corps 0
Pouvoirs : Armure corporelle 0, Champ de force 0, Contrôle des humains +1, Locaux : ECREME, Familier (Chien : Jésus).

" Requin " type (étudiants au service de Kolvyn)
AG : 2 PR : 1 VO : 2
AP : 2 PE : 2 FO : 2
Talents : Commerce 0, Esquive 0, Corps à corps 0

 

ACTE IV : LA MARCHE DES RETRAITES…

Dans l'hypothèse où les joueurs parviennent à mettre la main sur les contrats signés et sur le rituel d'ouverture de la marche (que Kolvyn oubliera dans sa fuite, s'il y est contraint), les joueurs vont certainement prendre leur courage à deux mains pour aller exécuter le rituel d'ouverture vers le viager.
S'il leur manque l'un ou l'autre de ces éléments, ils pourront toujours faire appel à leurs contacts pour découvrir ces informations, par exemple en téléphonant à Notre-Dame ou en contactant une bibliothèque cléricale locale.
A moins encore qu'ils ne laissent tout tomber et abandonnent la mission en l'état, auquel cas ils devront s'expliquer devant Yves.

Un cauchemar de jeune

A peine ont-ils exécuté le rituel, qu'une espèce de scintillement fait jour au centre du pentacle. Toute personne s'y trouvant à ce moment est immédiatement propulsée vers une marche intermédiaire très particulière, nommée le Viager.

 


Le portail reste ouvert durant deux heures, mais les personnages ne peuvent pas le savoir (ça n'est précisé nulle part) et peut être franchi dans les deux sens.
Toutefois, arrivés sur place, les personnages risquent d'avoir une très mauvaise surprise : les paroles du rituel sont devenues des réalités dans cette autre réalité. Le portail s'ouvre de l'autre côté sur un petit pavillon au fond d'un jardin… et les personnages s'y trouvent amoindris : ils ont perdu leurs dents, tous leurs pouvoirs offensifs, le contact avec leurs armes intelligentes, et semblent avoir vieilli de 50 ans au moins. Lorsqu'ils s'expriment, c'est avec une voix chevrotante (roleplay !). Bref, ils sont devenus des petits vieux dans une maison de retraite, et il est intéressant de noter que cet effet ne s'applique qu'aux anges : les humains restent inchangés, et les démons sont carrément immunisés !

Les lieux

Leur nouvel environnement se limite à l'intérieur d'une immense bâtisse s'étendant sur un nombre infini d'étages. Le rez-de-hauteur (car si la bâtisse semble s'étendre indéfiniment vers le bas, elle possède un étage composant le sommet, celui auquel les joueurs débarquent.) Lui, n'est composé que d'un hall d'entrée, et d'un petit couloir autour duquel s'agencent quelques pièces.

La salle du pentacle : il s'agit d'une petite salle carrée d'une dizaine de mètres de côté. Quelques éléments de marqueterie et de décorations en macramé produites par les pensionnaires sont accrochés aux murs. Contrairement à son nom, cette salle ne contient pas de pentacle, mais c'est là qu'aboutissent tous les portails allant au Viager.
Lorsqu'ils se mettront en route, les PJs auront certainement de drôles de sensations liées à leur état, marcher pourra s'avérer un calvaire... quant à prendre les escaliers... Pour " égayer " cette partie ennuyeuse on pourra choisir certains petits inconvénients à infliger aux joueurs. De l'incontinence à l'arthrite en passant par les hémorroïdes, les ongles incarnés, les simples rhumatismes, la très gênante maladie de Parkinson ou la problématique Halzeimer…

En sortant de la salle du pentacle, les PJs déboucheront dans le hall d'entrée. A leur droite ou à leur gauche un petit couloir, droit devant le hall en question, avec au fond à droite une cage d'ascenseur, au fond à gauche la cage d'escalier, et bien en face d'eux une porte d'où semble provenir une intense source lumineuse. Il ne leur restera certainement plus qu'à explorer ce nouvel environnement ou fuir la queue entre les jambes.

Le Hall d'entrée : au milieu du mur de droite une petite guérite avec hygiaphone isole le concierge des turpitudes de son petit monde. De son vivant Abdellah était patron d'un bistrot dans une banlieue particulièrement morte de Paris. C'est vous dire s'il les connaît, les vieux. La clientèle arriérée ne le dérangeait pas particulièrement, d'ailleurs elle lui permettait d'écouler de grandes quantités du " Parisien " sur lequel il faisait une petite marge. Étant bistrotier il n'avait rien non plus contre les racistes qui constituaient l'essentiel de sa clientèle, car il est bien connu que les patrons de bar n'ont pas de race. Par contre, les vieux, ça oui, il en a soupé Abdellah. Toujours à se plaindre, toujours à se tromper dans la monnaie, toujours à entreprendre des conversations insipides et interminables. Et les sempiternelles conversions en ancien franc, et pingres avec ça, au mieux une camomille, et que je te demande un bol d'eau pour le caniche... Mais par-dessus tout ils s'évertuaient à l'appeler Abdallah... Aussi, lorsqu'il cassa sa pipe Abdellah fût aussitôt recruté pour l'ouverture de cette maison de retraite prototype. Afin qu'il ne soit pas trop dépaysé et pour l'aider dans sa tâche les autorités infernales concédèrent même à lui laisser son chien, Sheriff, un authentique berger allemand de bar parisien, rendu apathique à force de maltraitance. L'opération de retraitement des âmes canines n'étant qu'à son balbutiement, le malheureux Sheriff existe simultanément dans les trois états de son existence, c'est donc le premier berger allemand à trois têtes. La tête de droite est la sienne étant chiot, celle de gauche (yeux voilés de bleu, dents jaunes et cassées, haleine fétide et poils blanc) celle de sa vieillesse, au milieu celle de ses vertes années, lorsqu'il était à l'âge de chien mûr.

Abdellah, dit "Le perse", concierge
AG : 2 PR : 2 VO : 2
AP : 2 PE : 2 FO : 2
Talents : Tenir l'établissement 0
Pouvoirs : Absoption Volonté 0, Contrôle poissons et mollusques 0

Sheriff, chien aberrant
L'attitude et les caractéristiques de sheriff dépendent fortement de la tête qui dirige actuellement le corps. Pour chaque heure, lancez un dé pour connaître le caractère du chien :
1-2 : jeune chiot. Sheriff voudra jouer avec tous ceux qu'il croise, et aura une attitude franchement cabot ! Son agressivité ne sera qu'une expression de son désir de jouer, mais peut être mal interprétée.
3-4 : chien adulte. La créature aura une tendance naturelle à aboyer de manière agressive, voire à attaquer les passants. Ils coursera les vieux comme un chien de troupeau course ses moutons, n'allant pas jusqu'à les blesser sérieusement, mais n'hésitant pas à faire le maximum pour canaliser les troupes !
5-6 : chien mourant. Sheriff jettera autour de lui un regard pisseux, et passera son temps à uriner sur tout ce qui bouge. Son haleine est fétide mais il est parfaitement inoffensif.

Les caractéristiques suivantes décrivent les trois états :
AG : 3/2/1 PR : 2/2/1 VO : 2
AP : 1/1/1 PE : 2/3/2 FO : 2/3/2
Talents : mordre 0/+1/0, Esquive +2/+1/+1, Sentir que quelque chose ne va pas 0/+1/0.

Lorsqu'ils tenteront d'avancer dans le hall d'entrée il est très probable que les joueurs attirent l'attention d'Abdellah ou d'une des têtes de Sheriff (qui aura toutes les chances d'être rabroué par son affectueux maître. S'ils se font remarquer par Abdellah, les PJs ont toutes les chances d'être pris pour des pensionnaires en promenade. Abdellah ne connaît pas par cœur l'ensemble de ses pensionnaires.

Le couloir de droite : une vaste salle sentant le renfermé, lieu de rendez-vous des non grabataires. De grandes tables bordées de bancs inconfortables et de trop profonds fauteuils sentant l'urine et le vieux gâteau, et des meubles de bois de mauvais goût constituent l'essentiel du mobilier. Tout là-bas dans le fond on devine un poste de télévision années 60 constamment allumé et dont la télécommande a été subtilisée par M. Raymond. L'imposant personnage a rivé son fauteuil à 50 cm de l'écran empêchant ainsi ses congénères d'avoir accès à l'image, tandis que sa surdité feinte le protège des récriminations.

Le couloir de gauche : cette aile comporte trois portes vers les chambres du personnel, et une quatrième vers ce qui semble être l'infirmerie. C'est du moins ce qui est inscrit sur la porte.

L'infirmerie : la motivation principale de l'établissement n'étant pas particulièrement le confort de ses pensionnaires, on ne sera pas troublé de découvrir en lieu et place de l'infirmerie une authentique salle de tortures médiévale. Pour la description vous pourrez laisser libre cours à votre imagination, de toute façon le manque de personnel empêche toute utilisation de l'infirmerie... Ce qui n'est d'ailleurs pas non plus la vocation de l'établissement puisque les pensionnaires ne sont pas ici pour subir un quelconque châtiment, mais pour attendre d'être transférés. Néanmoins, et pour contenir les résidents dans l'établissement les autorités infernales ont décidé d'embaucher un infirmier. Après tout pour une maison de retraite, un infirmier, ce n'est déjà pas si mal... Et puis en enfer aussi il y a des restrictions budgétaires. En échange d'une collection de médailles allemandes Rick Tappert accepta de reprendre du service. Infirmier familier des maisons de retraite, ce n'est ni la vue d'un dentier de travers ni celle d'un anus artificiel qui lui fera peur. Ayant en outre la carrure naturelle du chef de service gérontologie il sait mener ce petit monde à la baguette. Maniant conciliation mielleuse (Sa ressemblance avec son parent Horst Tappert est un atout majeur pour la manipulation des ménagères de plus de cinquante ans), logique mesquine, et fermeté lorsqu'il le faut, il est la clef de voûte de l'établissement. Tout le monde ici l'appelle " Le Rick ". Le Rick connaît très bien ses pensionnaires, les joueurs devront le convaincre qu'ils sont nouveaux ici. Ce qui ne devrait pas être trop difficile s'ils le rencontrent à l'infirmerie, puisque à chaque nouvel arrivage, les nouveaux pensionnaires y sont conduits par Abdellah pour " l'enregistrement " et le check-up.

Rick Tappert, le Rick, Infirmier
AG : 2 PR : 2 VO : 4
AP : 1 PE : 2 FO : 3
Talents : Intimider les vieux +1, Provoquer une crise de nerf chez les vieux +1, torture +1.
Pouvoirs : Absoption Volonté +1, Vieillissement 0

Le jardin ténébreux : il s'agit là d'un jardin dans lequel nulle personne saine d'esprit souhaiterait se promener. Sous un ciel sulfureux et incandescent (imaginez une lava-lampe de 400 Watts jaune et rouge) pousse une herbe calcinée. Des arbustes noirâtres et gémissants y étendent leurs branches rabougries et tourmentées. Une horde de créatures semblables à des chiens (peut-être même les joueurs pourront-ils reconnaître Jésus, s'ils l'ont tué) s'égaye dans les macabres allées brisant au passage les branches des arbustes, leur arrachant des cris déchirants. On distingue ça et là des arbres morts de plus grande taille auxquels se développent des fruits en forme de pendus. C'est là l'œuvre de Louis le jardinier qui veille avec une certaine forme d'amour au bon développement de ces plantes... disons exotiques. La température est très élevée, si bien que les pensionnaires - en auraient-ils envie - ne se risquent pas à l'extérieur.

Les étages : tous sont bâtis sur le même schéma. Un couloir de 120 mètres de long, des portes de chaque côté donnant sur des chambrettes de 10 mètres carrés, un ascenseur au milieu du couloir en vis-à-vis duquel on a accès à une cage d'escalier ouverte. La perspective de cet escalier infini est par ailleurs étourdissante. Les murs du couloir sont écaillés et jaunâtres, lézardés par endroits et une forte odeur pharmaceutique se mêle à une insidieuse puanteur d'urine et de moisi. Des sortes de longs tubes néons sont parcimonieusement disposés tout le long du couloir, grésillant sous l'effet de la trop basse tension à laquelle ils sont soumis. Certainement par mesure d'économie d'énergie. La faible lumière qu'ils diffusent renforce autant que faire se peut l'atmosphère pesante et glauque du lieu.

Pour le moment seuls les trois premiers étages sont peuplés, ce qui représente tout de même près de 60 personnes. Rangées par ordre d'arrivées, les deux vieilles dames que les PJs avaient à protéger sont situées au troisième sous-sol. Incapable de se déplacer, Brigitte se trouvera plus que certainement dans sa chambre. Quant à Amélie, faites comme bon vous semble : peut-être a-t-elle déjà commencé à piéger son nouvel environnement ?

Sauver les âmes !

Les personnages doivent maintenant parfaire l'œuvre de Dieu en intervenant pour le salut des âmes des pensionnaires. En théorie, c'est très simple : si le pacte a été déchiré, il suffit de convaincre les " prisonniers " de bien vouloir prier pour leur âme, ce qui ne devrait pas poser de problèmes pour tous ces vieux dont certains sont sincèrement bigots. D'ailleurs, si les anges ont détruit tous les pactes, certains pensionnaires s'évanouiront d'eux-mêmes à la prière du soir.
Bien sûr, différents obstacles risquent de rendre l'opération plus complexe.
D'abord, il arrive fréquemment que Sheriff, le chien d'Abdellah, se ballade paresseusement dans les couloirs. En soi, ce n'est pas forcément un problème. Le chien a une intelligence toute relative, qui peut encore être pondérée par la tête active au moment de la promenade. Dans le pire des cas, on assistera à une course poursuite (vitesse vermeil) dans les couloirs, avec calfeutrage dans une chambre. Ou encore, un petit pissou sur la jambe pour marquer son territoire.
Ensuite, les allers et venues des personnages peuvent attirer l'attention du Rick, qui s'ennuie suffisamment dans son infirmerie pour en sortir de temps en temps, histoire de visiter ses pensionnaires. L'absence de certains d'entre eux risque de le mettre d'assez mauvaise humeur pour provoquer un interrogatoire serré (d'une manière lente, ennuyeuse à mourir, mais qui tape aussi sûrement sur les nerfs qu'une séance de torture !). Bref, il faudrait trouver un moyen d'immobiliser ou de divertir les deux gardiens durant l'opération.
Eventuellement, une synchronisation des prières serait souhaitable.
Enfin, le dernier problème viendra sans doute de Brigitte Cajot… Ce n'est pas tant qu'elle ne croit pas en dieu, mais surtout qu'elle ne supporte pas que quelqu'un lui dise ce qu'elle doit faire. " Mais mon brave homme, je prie quand je le désire ! " Elle tentera bien sûr de négocier son retour sur terre, mais pour cet aspect, hélas, les personnages ne peuvent pas faire grand chose. Des anges particulièrement psychologues (!) lui promettront sans doute une grande renommée à titre posthume si elle accepte de se rendre à Dieu, mais de si viles promesses ne peuvent pas venir d'un être pur, n'est-ce pas ?

Reste un petit problème qui peut se poser : si les anges traînent trop, le portail sera fermé… Comment s'en sortir ? Une première méthode (suicidaire) consisterait à quitter le Viager par la grande porte et atteindre les limites de la marche. Dans ce cas, les personnages qui seraient parvenus à survivre aux plantes monstrueuses et aux chiens du jardin subiront une réinsertion aléatoire dans le monde réel.

Sinon, il reste une autre possibilité qui peut avoir des conséquences gênantes : prier pour sa propre âme. Dans ce cas, les anges atteindront le même endroit que toutes les âmes du Viager : le purgatoire… Il faudra nécessairement un petit temps avant qu'on s'aperçoive de l'erreur d'aiguillage, et ça ne sera pas forcément agréable. Tirez un test de volonté sur la ligne +1. Un échec peut entraîner une limitation d'ordre psychologique, à la discrétion du meneur.

Quoiqu'il en soit, à la sortie du Viager, les personnages reprendront heureusement leur forme de jeunesse, même s'ils sentiront encore quelques douleurs avant les jours de pluie et l'irrésistible envie de faire leurs courses à midi précise ou alors cinq minutes avant la fermeture d'un magasin…

EPILOGUE : FIN DE MISSION

Plusieurs fins sont envisageables pour ce scénario, depuis le pire des échecs à la plus éclatante des réussites :

1. Les personnages ne comprennent rien, et tout penauds, rendent compte à Yves de l'échec de la mission (" mais faut dire qu'on avait le MJ contre nous "). Evidemment, Yves ne l'entend pas de cette oreille. S'il ne dit rien pour le moment, il pointera toutes les failles dans les actions des personnages, et quelques jours plus tard, les personnages se trouvent affublés d'une limitation.
Si les joueurs continuent à s'intéresser à l'affaire après cela, ils apprendront fortuitement que l'ECREME a été dévastée par un incendie (Yves aura refilé nonchalamment le bébé à Dominique).

2. Les personnages suivent l'enquête, mais ne parviennent pas à libérer les âmes. S'ils ont réussi à faire fuir Kolvyn, Yves s'en contentera : après tout, même s'il n'a pas récupéré les âmes, au moins le danger immédiat est écarté, et les anges sont maintenant avertis du problème.
Yves montrera toutefois son mécontentement pour l'enquête bâclée. Les personnages reçoivent une récompense aléatoire (un nouveau pouvoir) mais Yves aura pour toujours une petite dent contre les PJs, et n'hésitera pas à être très mesquin à l'avenir.

3. Les personnages sont glorieusement allés libérer les âmes emprisonnées (au prix de quelques dents). Yves se montre tout fou, limite espiègle et remerciera chaleureusement les PJs pour leurs qualités d'investigation.
Les personnages peuvent choisir un nouveau pouvoir qui leur sera accordé au niveau 0 ou d'augmenter un pouvoir déjà disponible avec un maximum de +2 dans le niveau.


Uniquement si les joueurs ont réussi, bien sûr…

(Décor : un kiosque au sommet d'une petite colline herbeuse, au milieu de nulle part. Un homme et une vieille femme, tous deux souriants, sont assis sur les bancs qui bordent le kiosque. Il fait beau).

Brigitte Cajot : ah, c'était une grande époque vous savez, de grands acteurs, des scénaristes qui savaient faire les bons compromis et des réalisateurs qui ne jouaient pas aux stars.
Yves : c'est vrai, tout se perd. Et puis aujourd'hui la tendance est aux starlettes qui font deux films et sont ensuite oubliées… Tout le contraire de vous, ma chère.
Brigitte : oh, vil flatteur ! Au fait, je n'ai pas eu le temps de vous remercier pour ce que vous avez fait, tout se déroule si vite, ici…
Yves (rougissant) : c'était tout naturel, voyons. Et mes équipes sont là pour ça, vous savez. J'essaie simplement de les gérer au mieux.
Brigitte : vous êtes bien modeste. Allez, dites-moi ce que je peux faire pour vous remercier…
Yves : Eh bien… il y aurait bien une chose, mais… (il détourne la tête, gêné)
Brigitte : allez-y, n'hésitez pas !
Yves : Bien, voilà, je me suis toujours demandé… vous vous souvenez de votre film " Et Dieu tua l'infâme " ? Il y a eu des rumeurs sur votre liaison avec Serge juste après… C'était vrai ?
Brigitte : Mmh… d'accord… alors ça s'est passé comme ça…