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Pour : Les Chroniques de Katura
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Eastenwest > 22 - Une nouvelle aube
Nos personnages débutent cette première partie de l’histoire en possession d’une boîte mystérieuse et visiblement sans prix que diverses factions tenteront ici de récupérer.
Cette première partie de campagne sera l’occasion de se familiariser avec les contrées reculées du monde de la nuit avant d’en modifier irrémédiablement le paysage.
Blainfol est le dernier village montagnard avant le duché d’Abosme. Il faut tout de même compter trois jours à cheval dans les collines forestières pour arriver à Aboresme, le premier village impérial.
Fort d’environ quatre cents âmes, Blainfol compte essentiellement une population de trappeurs et de bûcherons auxquels se mêlent quelques négociants en fourrure faisant le lien entre l’empire et la majorité des trappeurs des montagnes voisines.
En dehors d’une rue principale, les allées terreuses sont assez étroites afin de conserver le maximum de chaleur et d’abri au cours de la rude saison hivernale. Au centre, on trouve quelques masures plus cossues et dépassant parfois, quoique rarement, les deux étages. En périphérie, on trouve plutôt des fermettes trapues et leurs granges. La rudesse des villageois ne provoque que rarement des débordements, principalement grâce au travail d’une excellente milice locale.
A leur arrivée au village, les personnages seront accostés par quelques miliciens en faction. Quiconque voyage dans la région doit s’attendre à passer plusieurs examens de routine, à plus forte raison lorsqu’ils viennent des dangereuses régions montagneuses. En outre, le meurtre récent d’un étranger au cœur même de la bourgade (voir plus loin) a secoué la population. Les miliciens n’évoqueront toutefois pas ce crime.
Les joueurs seront donc menés aux établissements de la milice où ils seront mis en présence d’un artefact de Phuomos destiné à vérifier leur nature. Concrètement, l’instrument provoque des brûlures d’autant plus graves aux individus qui le touchent que leur balance Faerique penche vers Thneskos. Des examens complémentaires, tels que la mesure de la taille des dents, permettront à un joueur de tenter de se disculper si les premiers examens venaient à lui être défavorables.
La milice doit être présentée comme des individus sûrs de leur pouvoir et de leur droit. Implacables, ils appliqueront les procédures avec ou sans l’accord des personnages. Cela peut également impliquer qu’un ou plusieurs des visiteurs soient placés dans une geôle pour quelques heures, afin de les rendre plus coopératifs.
Plus étrange, Maadhi Lopset, le « chef » de la milice, évoquera à plusieurs reprises le nom de « Chaerl Bramson », ce qui fera beaucoup rire les autres hommes présents. Un rire qui n’augure rien de bon… « Vous avez le choix entre coopérer tout de suite, et partir libres après ou attendre dans les geôles le retour de Bramson. Là, vous coopérerez de toute façon, à moins qu’il n’en décide autrement ! ».
Heureusement pour les personnages, la seule inquiétude des miliciens concerne leur état vampirique. La boîte passera inaperçue.
Une fois ces pénibles épreuves passées, les personnages sont libres. Rassurés, les miliciens s’excuseront même des tracas subis, et conseilleront aux voyageurs de passer à la « gentiane », l’unique auberge du village.
Situé au centre du bourg, ce bâtiment est certainement un des plus grands. Il fait à la fois office d’auberge, et d’échoppe généraliste sur le mode de la droguerie américaine : on y trouve des denrées alimentaires aux produits de première nécessité en passant par les médicaments et les hameçons pour la pêche ! Aldric Wengaster, le tenancier fait en outre office de négociant en fourrure et stocke un grand nombre de peaux dans un entrepôt annexe.
Les personnages pourront y prendre la température de Blainfol et y apprendre quelques rumeurs. S’ils s’enquièrent de la présence d’un certain « barbu » ils provoqueront l’hilarité du Taulier, en effet « à Blainfol, les barbus, c’est pas ça qui manque ! ». On leur apprendra néanmoins qu’un étranger prétendument négociant en peau a pris une chambre ici même il y a deux semaines.
« Pour le trouver, c’est pas difficile ! Indique Aldric, l’œil pétillant. Vous sortez, vous prenez à droite, vous tournez à la seconde maison à droite, et là, au coin, vous pouvez pas le manquer ».
Évidemment, le ton du tavernier ne laisse pas beaucoup d’espoir. Et si les personnages suivent ses indications, ils se retrouvent rapidement face à un cercueil, debout, adossé à l’établissement de pompes funèbres local.
Le cadavre est exposé, blafard, complètement exsangue. Une inscription à la peinture questionne le quidam « connaissez-vous cet homme ? ». L’individu en petite tenue arbore quelques tatouages dont un magnifique poisson marin couvrant les deux pectoraux. Les connaisseurs reconnaîtront l’espèce dudit poisson : un barbu. Deux orifices à la jugulaire désignent le responsable et rendent la milice particulièrement nerveuse. Si d’ailleurs les joueurs font montre d’un trop grand intérêt pour le cadavre ils attireront certainement l’attention des autorités. Ce sera le cas s’ils tentent de tourner le cadavre pour voir s’il dispose d’un autre tatouage. C’est effectivement le cas : sur l’omoplate gauche se trouve une petite étoile de mer ouverte au centre de laquelle une étoile brille.
Fort en gueule et jusqu’auboutiste, Chaerl n’a pas mis longtemps à quitter les rangs de l’armée impériale dans laquelle il s’était engagé. Son impétuosité et son manque de scrupules lui avaient valu de nombreux ennuis et des ennemis haut placés. Mais loin de constituer une fuite, pour Chaerl cette désertion exprimait simplement sa volonté implacable d’exercer ses deux passions : la chasse et la justice. Deux notions malheureusement incompatibles avec le faste empoudré de la civilisation. C’est donc dans les montagnes, lieu de tous les dangers, que Chaerl alla trouver sa raison d’être. Et depuis bientôt quinze ans qu’il dirige la milice, personne n’a jamais songé à revendiquer sa place. Tous ici l’admirent pour ses compétences indéniables. N’est-il pas le seul homme capable de partir en chasse trois semaines entière et de revenir avec des têtes de lycanthrope à sa ceinture ? Mais on le craint tout autant, car on le dit capable de la même cruauté froide envers l’humain, et pour lui, la fin justifie les moyens. De nombreuses rumeurs circulent d’ailleurs à son sujet. On prétend ainsi qu’ayant piégé un vampire dans une maison il n’aurait pas hésité à bouter le feu à la demeure, condamnant du même coup tous les habitants à y périr brûlés.
C’est encore à l’auberge que les personnages pourront en apprendre le plus. Le corps du « barbu » a été retrouvé tôt ce matin dans les bains municipaux par un certain Thmersk Goldbar. Thmersk, n’a de cesse de se féliciter d’avoir été retardé ce matin-là. S’il avait été à l’heure, il aurait été le premier client, comme à son habitude, et c’est lui qui serait dans la boîte maintenant ! Ça c’est lui qui y passait !
La victime se faisait appeler Ray Lalott. Son histoire de négociant en fourrures n’a pas longtemps tenu la route auprès du personnel de la gentiane. Il n’a même pas été difficile de deviner qu’il venait d’un autre monde !
S’il avait des affaires ? « Mais pourquoi demandez-vous ça ? Vous le connaissiez ? ». Il faut faire comprendre aux joueurs qu’ils avancent sur des œufs… Les Blainfollois ne sont pas ouvertement méfiants, mais on sent derrière leurs intonations une prudence permanente, encouragée par des années de survie difficile face à des loups-garous et des vampires.
Bref, il y a deux façons d’obtenir les informations : poser les questions ou écouter. La première méthode est plus rapide, mais implique du « donnant-donnant ». Quant à la seconde, elle est un peu aléatoire, mais très efficace. On pourra aussi deviner que dès qu’il a connu la mort de son client le tenancier s’est abondamment payé sur les deniers du mort. Ne laissant que la moitié dans les affaires à l’intention de la milice. Deux informations en particulier vont intéresser les joueurs.
les affaires de l’étranger vont être vendues aux enchères, le soir même, dans la grange servant aux réunions du village. Le fruit de la vente permettra de financer l’inhumation du cadavre, et le surplus sera versé aux miliciens pour l’achat d’équipement… Les biens de Ray Lalott ont été saisis par la milice, qui les garde chez elle jusqu’au soir. Inutile d’espérer les voler avant : le lieu est bien évidemment gardé !
On entendra encore parler d’un certain Chaerl Bramson, un milicien Faerique particulièrement efficace, parti traquer le loup-garou en forêt depuis deux semaines. Tous ici partagent un mélange d’admiration et de crainte pour cet être d’exception capable de la plus grande rudesse et d’une iniquité totale en temps de crise. Ses colères sont légendaires et devront dissuader les joueurs d’avoir envie de le rencontrer.
Il est plus que probable que les personnages viendront au moins en spectateur assister à la vente aux enchères du soir. Première constatation : la plupart des villageois présents viennent pour le spectacle. Ils n’ont visiblement pas très envie d’acheter, juste d’en savoir un peu plus sur le « mort ». Autre évidence : les enchères ne vont pas voler très haut, si l’on en juge par l’accoutrement des personnes présentes.
Du coup, un homme sort immédiatement du lot : barbu, les cheveux marrons, habillé de vêtements propres et peu abîmés, il s’exprime avec une diction impeccable et est salué par tout le monde. Il semble très apprécié et respecté. On apprendra facilement qu’il s’agit de Monsieur Saldon, un bourgeois qui compte parmi les plus riches du village. Il n’est surpassé que par le bourgmestre, Will Tuck, un gros bonhomme un peu bredouillant qui officiera en tant que commissaire-priseur durant les enchères.
Voici dans l’ordre les objets qui seront mis aux enchères. Il est à noter que Saldon n’enchérira jamais sur aucun objet. C’est à se demander ce qu’il fait là !
Un sabre d’abordage : l’objet fait une bonne arme, rare sur ce monde, mais ne présente pas d’autre intérêt.
un sextant des étoiles : encore une curiosité locale. Le villageois ne voulait l’avoir que comme objet décoratif : il ne sait pas s’en servir, de toute façon.
Un lot de 3 cartes stellaires : des cartes de routes apsukiales connues. Il y a quelques notes codées dessus, mais sans intérêt.
un lot de vêtements : le lot le plus pratique pour les villageois. L’un des vêtements contient un morceau de papier sur lequel est griffonné une adresse : « le grenat écarlate, Agony ». Sans doute un lieu de rendez-vous.
A partir du sextant, un homme fait discrètement son entrée dans la salle. On finira par le détecter à son odeur : l’odeur d’un homme qui ne s’est pas lavé depuis une éternité. Il est sale, mais porte un équipement de qualité. Rapidement, son nom circule parmi les spectateurs : « Chaerl Bramson ». L’homme reste à l’entrée, observe avec attention les enchérisseurs. En fait, le poids de son regard devient presque physique. Un sourire carnassier illumine parfois son visage, en particulier si les personnages enchérissent… Mais il ne fera rien d’autre.
A la fin des enchères, le milicien viendra les saluer et les jauger. L’odeur est épouvantable, et il est difficile de dissimuler son dégoût. Cela semble d’ailleurs beaucoup l’amuser. Heureusement, au moment où la confrontation est la plus pénible, Saldon vient à leur rescousse. Il salue poliment Bramson, s’enquiert de sa « chasse » et son retour, puis se tourne vers les personnages pour les inviter à dîner. Il apparaît avec évidence que les deux hommes ne s’aiment pas du tout. Chaerl semble même avoir du mal à dissimuler un regard haineux quand son interlocuteur ne le regarde pas. En tous cas, cette invitation est surtout une très bonne occasion pour se soustraire à la présence de Chaerl !
Pas de problèmes : l’acheteur ira les prendre, en essaiera certains, constatera que l’une des poches est encombrée d’un morceau de papier. Après y avoir jeté un coup d’œil discret, il le jette par terre sous le regard des personnages qui n’ont plus qu’à le récupérer.
Sauf qu’au moment où ils se penchent, le pied de Chaerl vient se poser sur le papier. Le milicien ramasse le papier, et sans le regarder, le tend aux joueurs avec un sourire sur le visage. La conversation s’engage alors sur cette nouvelle base.
Saldon le vampire civilisé habite une grande villa en marge de la ville. Il y pratique l’élevage depuis une vingtaine d’année et avec ses quarante employés, il fait partie de la petite bourgeoisie locale. Il ne se mêle cependant que rarement à l’activité mondaine de la bourgade. Averti par le séide de Llywin il a immédiatement mis en branle son réseau de fidèles et a ainsi été averti dès l’arrivée des personnages à Blainfol. C’est donc en tout état de cause qu’il est sorti de sa réserve pour aller à la rencontre des joueurs. Son objectif est très simple : s’arranger pour que les personnages et la boîte se retrouvent chez lui, puis se débarrasser de ces dangereux voleurs !
Le repas se passe cordialement. Si les personnages ont la boîte avec eux, ils pourront toutefois constater que leur hôte s’intéresse à l’objet, mais qu’il fait tout pour que cela ne se remarque pas trop : en effet, il connaît l’objet, ainsi que son importance, mais pour que son plan fonctionne, il faut qu’il arrive à endormir la vigilance de ses invités. Si par malheur, les personnages ont laissé la boîte à l’auberge, il enverra discrètement deux de ses serviteurs la chercher, ce qu’ils feront à priori sans problèmes. Saldon sera dans ce cas de figure un peu plus nerveux, mais se détendra visiblement lorsqu’un de ses serviteurs viendra lui confirmer à l’oreille la réussite de la récupération.
C’est alors qu’il sert une nouvelle rasade de vin à tout le monde. Il sera aisé de découvrir qu’il semble y avoir un arrière goût dans le liquide, qui tranche avec la qualité du vin qu’on leur a servi jusqu’à présent. Difficile d’alerter tout le monde sans froisser Saldon, mais en réalité, ce dernier n’en a cure. Certain d’être en position de force (40 serviteurs, des invités éventuellement drogués, …), il ne cache plus ses ambitions, et annonce son désir de « punir les voleurs » par d’exquises séances de tortures et son plaisir d’avoir récupéré un objet qui lui appartient « à lui et à ses pairs » avant qu’il ne soit utilisé entre de mauvaises mains…
Si les personnages ont bu ne serait-ce qu’une gorgée de vin, le poison fait rapidement son effet qui est d’altérer la perception du temps : la victime a l’impression de voir les choses au ralenti, mais agit également comme tel, rendant très difficile les actions coordonnées. En pratique, chaque personnage empoisonné a un malus à tous les jets. Visiblement, Saldon souhaite jouer avec les personnages. Il se place en retrait, et laisse ses sbires bloquer les issues et leur infliger de menues blessures. La nature de zombies de certains des serviteurs apparaîtra dès les premiers coups qui leurs seront assénés par les personnages ! Une situation cauchemardesque renforcée par les effets de la drogue.
Quand la situation semble désespérée, une fenêtre est soudainement brisée et l’un des serviteurs prend feu. Quelqu’un vient de jeter une bouteille d’alcool enflammée dans la maison. D’autres suivent assez rapidement. Dehors, une voix retentit : « tuez les tous. Ne vous posez pas de questions. Mais récupérez la boîte ! ». Tout le monde reconnaît facilement la voix de Chaerl Bramson, qui part dans un grand éclat de rire un peu fou.
Un rapide coup d’œil à l’extérieur permet de voir que les miliciens, conduits par leur chef, sont en train d’attaquer la ferme. Les serviteurs, paniqués, sont rapidement réorientés vers les nouveaux ennemis. « Saldon ! Je t’avais dit que je t’aurais un jour », continue la voix à l’extérieur. Saldon réagit à cette affirmation par un rugissement de bête. Rester dans la maison, c’est être sûr de finir brûlé. Vu le nombre de miliciens et leur entraînement, il faut aussi éviter de se retrouver entre leurs pattes, d’autant plus que leur « tuez les tous » ne laisse aucun doute sur leurs intentions.
Pas le choix : il faut profiter de la cohue pour fuir. Les personnages penseront-ils à emporter la boîte ? Il leur faudra alors l’arracher à l’un des zombies (sans trop de difficulté) pour s’enfuir par derrière. Il y aura peut-être une course poursuite. En tous cas, les personnages sont fortement encouragés à courir, toutes affaires cessantes. Pour aller où ? Très certainement vers la « civilisation » ! Si d’ailleurs ils avaient le loisir de réfléchir les joueurs se rendront compte qu’il ne leur reste plus qu’une seule piste : Agony…
L’attitude des différentes factions déjà rencontrées devrait les avoir convaincu de l’importance de l’objet. Pourtant, ils pourraient décider de ne plus s’en occuper. Attitude peu aventuresque, mais assez raisonnable, au vu des derniers événements.
La boîte tombera alors certainement entre de mauvaises mains, et sera ouverte (cf. section « Le cas de la boîte », plus loin). Les personnages seraient sans aucun doute considérés comme responsables de la situation (par les vampires, par les miliciens, plus tard, par l’armée) et activement recherchés. On pourrait alors leur proposer un marché : régler la situation en échange d’une remise en liberté. Sinon… de toute façon, à plus ou moins long terme, ce sera la peine de mort !
Dans cette alternative donc, les joueurs se priveront de la seconde moitié de cette première partie. En échange ils auront droit à une chasse à l’homme (pas forcément concertée, d’où de nombreux rebondissements !) de toutes les factions possibles. Ils embrancheront néanmoins normalement sur la seconde partie du scénario.
Suite à leur escapade rocambolesque les personnages prennent le chemin d’Aboresme, une promenade mouvementée qui durera presque trois journées. En cours de route, ils échapperont de peu à un éclaireur loup-garou et seront obligés d’en combattre un autre. Ce sera l’occasion de mesurer la grande force de ce genre d’adversaires. Dans la forêt, les joueurs pourront néanmoins compter sur la présence d’un campement avancé de bûcherons pour trouver un abri nocturne et quelques provisions de bouches. Une aubaine, car ils n’auront certainement pas eu le temps d’en prendre avant leur départ précipité de Blainfol.
A l’aurore du troisième jour, alors que la forêt s’éclaircit, les personnages sont victimes d’un guet-apens de loups-garous. Pas d’autre alternative qu’une fuite désespérée vers la vallée et les fumées d’Aboresme qu’on devine en contrebas derrière la colline. Au moment où tout espoir semble vain, les personnages sont sauvés par l’action providentielle de la milice locale. S’ensuit un combat violent au cours duquel nombre de vaillants miliciens sont mis à mal. Plus tard, les vétérans seront d’ailleurs unanimes quant à la bizarrerie de comportement de leurs assaillants. Les loups-garous sont barbares et violents, mais ils ne sont certainement pas suicidaires. Or dans cette affaire, ils ont semblé mettre une ardeur particulière dans la bataille en dépit de leur infériorité numérique flagrante. Ils ne se sont d’ailleurs résolus à fuir qu’en dernière instance.
Après le massacre de Blainfol il pourrait tout à fait souhaiter la mort des joueurs, ou tout du moins avoir des explications à bon nombre de ses interrogations. Il pourra alors leur donner la chasse dans les collines, et donner lieu à quelques scènes cinématographiques sympathiques. Le traqueur pourrait ainsi débouler avec fracas dans le repaire isolé des bûcherons, rompant une accalmie. Il pourrait aussi sauver encore une fois et bien malgré lui les joueurs d’une mort certaine. Il se peut encore qu’il suive la trace des joueurs jusque dans l’empire et qu’il ne devienne un allié de poids une fois la boîte ouverte. A moins que ce ne soit lui qui ait la primeur de l’ouverture de la boîte, auquel cas il se consumera dans l’entreprise.
Après un bref rassemblement, le sergent de milice ordonne le rapatriement des blessés et des morts. Quelques instants plus tard les PJs débouchent dans Aboresme sous le regard inquisiteur de la population. Les nombreuses têtes de lycanthropes fichées en bout de lance parviennent à peine à surpasser l’horreur qu’inspirent les pertes subies par les hommes.
La ville d’Aboresme est un des premiers camps retranchés bâti par l’empire pour garantir ses frontières. Édifiée sur une île à la sortie d’une vallée, elle est ceinturée par une palissade de pieux fichés en terre et d’un muret de pierre. Elle offre un refuge plus que rassurant à ses mille deux cents habitants. Un sentiment renforcé par les deux cents miliciens du bastion du cerf, réputés jusque dans la ville d’Agony. Les rues de la ville sont sales et étriquées et la suie noirâtre des forges se dépose partout. Aboresme est une ville de mines.
Le capitaine Turwal, un quadragénaire bedonnant, s’est illustré plusieurs fois sur le terrain. Il a la réputation d’un homme droit et fier, capable des plus grands sacrifices pour ses hommes. Il met un point d’honneur à ne recevoir d’ordre de personne que du Duc d’Abosme. Ce qui n’est pas sans provoquer quelques frictions lorsque, comme c’est le cas en ce moment, l’armée vient enquêter sur son terrain.
A l’inverse, le lieutenant Edwin De Majeuneau est un jeune aristocrate arriviste. Voilà trois ans qu’il est sorti de l’académie militaire avec son titre en poche, et il compte bien se faire rapidement remarquer par la hiérarchie. Enquêteur de l’armée impériale, ses attributions concernent les problèmes hors monde. A savoir, toutes les affaires où l’on suspecte la présence d’individus provenant d’autres mondes. En l’occurrence, l’armée est sur la trace d’un certain «Barbu» dont le nom apparaît dans une enquête sur le vol et la mort de plusieurs nobles. L’armée n’a que peu d’indices sur l’individu, si ce n’est qu’il s’agit très vraisemblablement d’un pirate et qu’aux dernières nouvelles il s’est étrangement rendu sur la frontière ouest de l’empire.
Désoeuvrés et sans piste concrète, Edwin et ses hommes ont recours à des arrestations arbitraires pour interrogatoire. Une situation très mal vécue par la population qui ne porte déjà pas «ces tire-au-flanc de l’armée» dans leur cœur. Le capitaine Turwal ne cache pas non plus sa désapprobation, mais quoi que ce blanc-bec lui soit inférieur en grade, il est tenu de coopérer. Ce qu’il fait de mauvaise grâce en intervenant le moins possible.
Les joueurs ne manqueront pas d’être avertis de la situation tendue et recevront moult avis partiaux.
Les personnages seront rapidement amenés à rencontrer l’investigateur impérial. Avec ses manières brutales de jeune carnassier, Edwin saura certainement se faire détester dès les premiers instants. Il est à noter qu’Edwin possède un artefact Faeric secret privilège de sa charge d’investigateur impérial : un bâton de vérité. Cet objet métallique frappé du sceau impérial lui permet trois fois par jour de savoir lorsqu’on lui ment. Ainsi, même si les joueurs ne souhaitaient pas coopérer, le séide de l’empire comprendra rapidement qu’on lui cache quelque chose et prolongera la garde à vue le temps qu’il faudra. C’est d’ailleurs la mauvaise volonté généralisée des habitants du bourg qui est à l’origine de leur trop long enfermement et donc de leur grogne. Pour finir de refermer la nasse sur les joueurs ajoutons qu’Urbain De Florival, le second d’Edwin est doué de télépathie. Ce qui lui permet à l’occasion de happer quelques propos dans la mémoire des interrogés…
Plusieurs personnes pourraient décider de leur venir secrètement en aide. Ce sera par exemple le cas de quelques partisans du dévoreur lumineux qui voudront apprendre où « l’entité de destruction » a été remisée, ou Turwal qui en aurait soudainement assez qu’on vienne chercher noise à des gens qui se sont battus à ses côtés contre les loups-garous.
Notez que plus les joueurs perdent du temps, plus il y a de risques que les nouvelles concernant les événements de Blainfol parviennent à Aboresme, ce qui ajouterait sans doute à l’embarras des joueurs…
Avant leur incarcération les joueurs auront certainement l’opportunité d’assister au prêche d’un apocalypsiste forcené. L’individu éructe des propos sur l’imminence d’un brasier purificateur qui consumera l’univers entier. Il prend les passants à partie et les exhorte à se repentir. Il désignera alors les joueurs, prétendant que ce sont eux les cavaliers qui amènent la mort. Naturellement l’individu est connu de tous comme un fou non dangereux, et tout le monde prend ses propos à la rigolade.
Le basculement vers la deuxième partie du scénario, tournée toute entière vers la résolution du problème posé par le nouveau soleil dans le monde dépendra bien évidemment du moment où la boîte sera ouverte. Une des tâches difficiles du meneur dans cette histoire sera de tirer à hue et à dia pour faire en sorte que l’ouverture se déroule approximativement après le passage à Aboresme.
Il faudra dans un premier temps retarder la volonté des personnages d’ouvrir la boîte. Pour cela, vous disposez de plusieurs outils :
jouer sur la morale des personnages : comment, on leur a explicitement dit qu’il ne fallait pas ouvrir la boîte, et ils vont tout de même le faire ? Est-ce bien normal ? La meilleure voie ne consisterait-elle pas à rapporter l’objet à son propriétaire pour qu’il en dispose selon son gré ? Evidemment, cet argument ne vaut que si les joueurs ONT une morale, et si les péripéties de plus en plus dangereuses que la boîte occasionne ne les amène pas à préférer savoir ce qu’ils transportent…
Jouer sur la volonté : il est à l’inverse possible que les joueurs souhaitent directement ouvrir la boîte, ou ne veuillent pas du tout le faire (nous verrons que dans ce cas, nous disposons d’une autre méthode…). Vous pouvez exploiter le système technique de Katura en demandant à vos joueurs trop entreprenants (ou pas assez) des jets de volonté de difficulté croissante pour ne pas céder à la tentation, ou au contraire, en fonction des attitudes, pour voir s’ils ne sont pas plus curieux qu’ils ne le pensent !
Toutefois, il serait facile pour un joueur de feindre de ne pas être curieux. Après tout, ça n’engage à rien de soutenir mordicus que son personnage sait résister à la tentation ? N’hésitez pas, dès qu’un personnage est seul avec la boîte, à lui suggérer, à la manière d’une mauvaise conscience, qu’un regard ne coûterait rien et ne causerait certainement pas de dommages irréparables… puis, lorsque le personnage est prêt à craquer, faites intervenir un élément perturbateur qui gène son plan (le retour des autres PJs, un appel depuis l’extérieur, un craquement dans l’obscurité de la forêt, etc.)
Enfin, si vos personnages brûlent trop vite les étapes, vous pouvez insister sur la difficulté des trois serrures qui ornent le coffret. Il s’agit en effet de mécanismes subtils, délicats et assez sûrs qu’il n’est pas facile de crocheter. L’ouverture de chaque serrure prendra ainsi suffisamment de temps pour réguler la fougue des joueurs : on pourra aisément négocier l’ouverture d’une ou deux serrures malgré les nombreuses interruptions. En fait, le seul moyen rapide d’ouvrir la boîte serait de détériorer le système de verrouillage… Un acte irréversible et qui risquerait en plus de détruire le contenu, ce qui pourrait encore faire réfléchir les personnages… En définitive, l’essentiel est que le dernier loquet tienne suffisamment longtemps pour permettre à cette première partie d’être riche.
Eh bien, on ne peut effectivement pas les forcer à le faire. Toutefois, la boîte doit être ouverte pour que le scénario puisse se poursuivre normalement. Vous profiterez alors d’un des affrontements (miliciens, militaires, loups-garous, adorateurs du soleil, etc.) pour qu’un ennemi entreprenant puisse mettre la main sur l’objet tant convoité. S’il le faut, modifiez légèrement les jets de dés à l’avantage des ennemis pour que le personnage porteur soit assommé, que la boîte lui tombe des mains, que la lanière de son sac soit coupée, etc.
C’est alors cet ennemi, insuffisamment informé des risques encourus, qui ouvrira la boîte et libèrera Argol…
Voici comment pourrait se dérouler l’ouverture de la boîte…
Il y a fort à parier qu’après quelques temps en compagnie de l’interrogateur impérial les joueurs finissent par craquer et par raconter tout ou partie de leur histoire. Il finira donc par accompagner les joueurs dans leur auberge où on lui remettra la fameuse boîte.
A cet instant, alors que la boîte est sur le point de changer de main, ou mieux : d’être ouverte, la secte du dévoreur lumineux passe à l’action. Profitant de l’effet de surprise (peut-être auront-ils provoqué une algarade entre l’armée et la population ?) une demi-douzaine d’hommes en toge blanche s’emparent du coffret et prennent la fuite, couverts par des sympathisants.
On les retrouvera non loin de la sortie de la ville sur un petit promontoire naturel offrant un abri propice à la défense. De fait, seul l’un d’eux s’active à l’ouverture de la boîte en psalmodiant des rituels cependant que ses amis ralentissent la progression des joueurs.
Enfin, la boîte est ouverte. Une vague de lumière déferle dans le ciel et on entend un hurlement. Les défenseurs lâchent alors leurs armes et se précipitent vers le haut de la colline se disputant le contenu de la cassette. Une boule de la taille d’un petite balle et aussi lumineuse que le soleil d’été tombe au sol et embrase tous ceux qui la touchent. En quelques secondes tous les sectaires gisent au sol, carbonisés.
La boule continue d’émettre sa lumière intense, et dans sa proximité directe la chaleur est intenable. De plus sa croissance bien que lente est parfaitement inexorable. Dès lors plus moyen de remettre l’astre dans sa prison.
Si dans un premier temps les gens sont heureux d’avoir plus de lumière et de chaleur, ils ne tardent pas à s’inquiéter de la croissance de la boule solaire. A ce rythme, dans deux jours il faudra évacuer la ville, et dans moins d’une semaine la ville aura été rasée. Quant à la capitale, on ne lui donne pas deux mois...
Dès cet instant l’attitude de tous les protagonistes changera du tout au tout. En particulier, Edwin deviendra nettement plus conciliant. On est passé d’une vulgaire affaire de pirates à une histoire aux conséquences dramatiques. Si elle se finit bien, cette affaire est sans conteste la chance de sa vie.
Précisions enfin que tous les partisans du dévoreur lumineux ne sont pas morts durant la libération d’Argol. D’autres «moins chanceux» d’après leurs critères sont encore là et veillent à ce que personne ne menace l’intégrité du soleil naissant.
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