Aide de Jeu


Pour : DD3


Auteur(s) :

Benjamin SCHWARZ

Père Carmody

Illustrateurs(s) :

Frédéric Plewniak


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Eastenwest > 19 - Lieux de savoirs



La bibliothèque universelle

Trois grandes questions divisent les sages de Ghelsaïs : est-elle infinie ? d'où vient-elle ? quand est-elle apparue ? Les théories sont aussi nombreuses que les sages et une seule a l'assentiment de tous : les réponses sont forcément à l'intérieur.

Mais ces arguties d'érudits n'intéressent que peu de monde en somme, la plupart des visiteurs viennent chercher les réponses à des questions autrement plus importante pour eux, et ils viennent de loin.

La ville de Ghelsaïs fait partie de ces curiosités du monde où l'histoire semble s'être battue avec la nature elle-même, et avoir gagné. Rien ne justifierait en effet qu'on bâtisse une ville au beau milieu d'un plateau rocailleux visité seulement par les vents. Rien ne permettrait en tout cas de supposer qu'une telle ville puisse prospérer et atteindre gaillardement les cinquante mille âmes. Rien ne laisserait non plus supposer qu'elle devienne un centre d'intérêt, un lieu d'échange et de rencontre grouillant de vie et d'activité.

 

 

Au centre de cet immense désert de roche, le vert profond des jardins et des fermes cerclant la bourgade la font apparaître au voyageur comme une émeraude dans sa gangue rougeâtre. Les premières bâtisses apparaissent enfin et l'on est surpris à la fois par la taille et par l'effervescence du lieu, contrastant avec le calme du plateau qu'il a fallu traverser. La ville en elle-même renferme bien des motif à s'extasier, et le voyageur a bien des occasions de lever la tête avant d'atteindre le but de son voyage, cet immense cube d'obsidienne fiché de guingois au centre de la cité. C'est là en effet l'objet qui attire tant de pèlerins, justifiant l'existence même de la cité : la grande bibliothèque de Ghelsaïs, la bibliothèque universelle.

Le cube noir de près de cinq cent mètres d'arête est totalement lisse à l'exception d'une petite faille située à quelques dizaine de mètres du sol, c'est là le passage qui permet de pénétrer dans la bibliothèque. On la dit infinie, que son réseau de salles s'étendrait à perte de vue dans la montagne et qu'elle contiendrait tous les livres jamais écrits dans l'univers. On prétend encore qu'on peut y trouver les livres qui n'ont pas encore été écrits, ainsi même que ceux qui ne le seront jamais. Et il se pourrait bien qu'on ait raison !

Il est fort probable que l'établissement réside dans un autre univers, à l'intersection de plusieurs, ou peut-être même à la croisée de tous. On n'a cependant encore jamais trouvé d'autres portes ! L'intérieur du bâtiment est composé de salles, toutes bâties sur le même schéma cubique, et reliées les unes aux autres par des puits carrés situés au centre de chacune des faces. Ces salles de dix mètres d'arrête constituent toutes un petit plan dont les lois de la pesanteur sont telles qu'on peut marcher sur toutes les faces, changeant à chaque passage les murs en sols et plafonds, et vice et versa. Sur le pourtour de chacun des six puits d'accès, trois rayonnages de livres s'étalent sur deux mètres de haut et quatre de large. Une lumière diffuse semble comme sourdre des murs pour caresser les rayonnages d'une lueur tamisée. Dans les huit coins, de petits cubes faisant partie intégrante de l'infrastructure permettent de s'asseoir pour se reposer ou pour lire. D'autres, plus grands, font office de table.

Fort heureusement le temps n'a pas cours ici, ce qui permet à certains d'envisager une éternité passée à apprendre, mais plus prosaïquement aussi autorise à tous de se passer des contingences matérielles telles que la sustentation ou les besoins naturels. Autant de points qu'on apprécie lorsqu'on sait devoir passer parfois plus d'un mois à la recherche d'un ouvrage. Techniquement, au sein de la bibliothèque seuls les effets physiques sont abolis, le temps, lui s'écoule bel et bien, quoique six fois moins vite à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Outre les lecteurs autorisés, la bibliothèque comporte sa faune propre. Ces entités qu'on ne rencontre nulle part ailleurs, bien que très différentes les unes des autres présentent de grandes similitudes dans leur apparence. Elles présentent toutes la même peau lisse et squameuse de couleur noirâtre veinée de vert. Toutes possèdent le même faciès totalement glabre et dépourvu d'appendices ou d'orifices, et la même capacité à se mouvoir sans aucun bruit. Elles semblent toutes liées à la manière des fourmis ou des abeilles, et sont de la même manière entièrement vouées au fonctionnement de la bibliothèque. Ainsi, les disparités physiques correspondent à des tâches différentes. Les Shtts, massifs et puissants veillent au maintien de l'ordre, se contentant généralement d'immobiliser les fauteurs de troubles. Les Bahns à la silhouette squelettique ont un rôle similaire qu'ils exercent grâce à leurs aptitudes magiques, renvoyant les importuns vers leurs univers d'origines. Les Ephyrs, êtres ailés et graciles au rôle mal défini sont de tous les plus mobiles et les plus réceptifs à leur environnement. Faisant à la fois office de transporteurs, de guides et de gardiens, ils font le lien entre tous les ouvriers. Les Skryptors, rares et précieux, sont les plus hermétiques. Mûs par une mystérieuse inspiration ce sont eux qui rédigent les ouvrages garnissant les rayonnages de l'établissement. Les Kopystes, plus nombreux et plus accessibles ont la charge de créer physiquement les livres, ainsi que de reproduire ceux rédigés par les Skryptors. Les Arkyteks vouent leur énorme puissance à la construction des salles. Ils sont tellement rares qu'on ne sait s'il en existe plus d'un. Quant aux Memoyr, décharnés et lents, ils ont le don de connaître la direction approximative vers n'importe quel ouvrage dans la bibliothèque. À ces espèces majeures s'ajoutent une cinquantaine d'autres, moins connues mais partageant toutes les mêmes caractéristiques physiques et cet attachement à l'intérieur du bâtiment. De fait, on n'a jamais surpris que les Karabs, ces lourds scarabées bipèdes, à l'extérieur du cube d'Obsidienne. Certaines légendes relatent aussi l'existence d'émissaires vengeurs chargés de récupérer les ouvrages que des indélicats se seraient sentis autorisés à enlever à la bibliothèque ; mais rien n'est moins certain. Après tout, d'autres légendes prétendent que les ouvrages auxquels on tente de faire franchir les portes de l'édifice cessent simplement d'exister. En tout état de cause, le prêt à domicile n'existe pas ici, on doit se contenter de lire sur place ou de recopier soi-même les passages importants. Cependant certaines personnes ayant percé quelques mystères de la faune endogène réussissent à s'attacher les services d'un Kopiste. C'est là le seul moyen d'obtenir rapidement une reproduction à l'identique d'un ouvrage.

Mais l'accès au cube est rigoureusement contrôlé, protégé par une enceinte de pierre et une cent cinquantaine de gardes. Seuls les lecteurs assermentés ont le droit de franchir le seuil d'obsidienne, et ces autorisations ne sont pas données à la légère. Chaque demande est étudiée par le conseil des sept sages présidé par le vénérable. Généralement les demandeurs se voient refusés l'accès à la bibliothèque, aussi doivent-ils passer par les services onéreux de lecteurs assermentés qui feront les recherches à leur place, versant au passage une forte commission au conseil. Il s'agit là d'un rapt éhonté du savoir, et bien des puissants ont songé à prendre la ville d'assaut pour en chasser ces autocrates pédants. Mais il faut bien reconnaître qu'au fil du temps, ces initiés ont su se rendre indispensables. Ils sont en effet les uniques dépositaires des arcanes de la bibliothèque. Si l'infrastructure humaine gravitant autour de l'édifice venait à s'effondrer, il faudrait bien quelques décennies avant qu'on puisse espérer à nouveau tirer un quelconque savoir du cube noir.

Il existe néanmoins de nombreux moyens d'accéder à la bibliothèque. La corruption, bien qu'envisageable, ne sera vraisemblablement pas au niveau des bourses des PJs. Les sept sages sont en effet bien assez riches, mais heureusement assez avides d'autres profits. L'intrigue et les luttes de pouvoirs sont pour eux une seconde nature, et bien des votes ont été concédés sur la base d'informations ou de services discrets. Les sages, tout puissants dans la ville, n'aiment rien plus que de se tirer dans les pattes en gênant un rival sur une affaire, ou en favorisant un allié.

En dernier recours, le sein de la bibliothèque n'étant pas toujours des plus tranquille, on a parfois recours à des mercenaires grassement payés pour protéger des lecteurs assermentés devant se rendre dans des zones sensibles. Certains livres en eux même peuvent en effet représenter des dangers, il est par exemple une salle consacrée aux ouvrages de magie qu'il vaut mieux éviter. Mais dans le silence et la solitude des salles tamisées il arrive aussi tout simplement que certains lecteurs oublient les règles de bienséance pour s'emparer des travaux d'autrui. Et puis, pour être tout à fait honnête, au fil des siècles bien des individus peu recommandables ont réussi à se faire oublier dans les méandres de ce lieu de savoir.

scénarios

La ville de Ghelsaïs en elle-même permet toutes les intrigues qu'une bourgade de cette taille autorise généralement. On notera que la prédominance du savoir et de la politique est favorable aux problématiques d'érudits ou aux intrigues de salons. Toutefois, l'omniprésence de la bibliothèque impose presque un rôle central dans les trames scénaristiques. On pourra par exemple considérer qu'arrivé à un âge avancé le vénérable El Yszabeyt comprend qu'il n'aura jamais le temps de terminer son grand œuvre. Un des notables de la ville briguant une place au conseil pense pouvoir s'attirer les votes du vieil homme et de ses partisans en produisant le livre que le vénérable n'aura pas le temps d'écrire. Il s'offre donc les services des personnages qu'il envoie sous un faux prétexte dans la bibliothèque. La route est longue et semée d'embûche, d'autant que certains sages ne voyant pas d'un bon œil les prétentions du notable ont dépêché des sbires dans le cube d'obsidienne comme dans la ville. Dans le même temps un autre notable a eu la même idée, et un second groupe est secrètement en compétition avec les PJs. En tout état de cause, le retour avec le livre donnera certainement lieu à bon nombre d'embuscades et d'enchères.

Les personnages pourraient aussi être envoyé à la recherche d'un lecteur missionné il y a plus de six mois et n'ayant toujours pas donné signe de vie. Leur employeur ne leur révèlera bien entendu pas qu'il avait révélé une information critique à son lecteur : l'emplacement possible d'une porte vers un autre univers au sein de la bibliothèque. Les personnages apprendront rapidement d'un vieux barbon ayant oublié jusqu'à l'existence d'un extérieur, que des mystérieux détrousseurs de livres sévissent dans les profondeurs du bâtiment, celui qu'ils recherchent a certainement été leur victime. Ils découvriront alors rapidement que celui qu'il cherche s'est en fait attiré les services de mercenaires et dérobe des recherches critiques pour le compte d'un des sept sages. Le portail d'univers existe bien et lui sert justement de point de replis pour n'être pas découvert. Il compte d'ailleurs bien vendre cette information plus tard, pourquoi pas pour obtenir une place au conseil.

Il est encore possible d'imaginer un visionnaire, à moins qu'il ne s'agisse d'un fou, qui souhaite ajouter à sa collection hétéroclite un de ces Arkyteks ou de ces Skryptors dont la bibliothèque regorge. Certainement a-t-il d'autres ambitions en vue, ces deux entités ont en effet des fonctions bien utiles. Quoi qu'il en soit, les joueurs ne sont pas au bout de leurs peines, il leur faudra s'opposer à la fois aux résidents de la bibliothèque et à ceux de la ville. Mais le jeu en vaut certainement la chandelle...

PNJs

La ville de Ghelsaïs compte relativement peu d'artisans, un grand nombre de commerçants et d'aubergistes, ainsi qu'une concentration élevée de lettrés travaillants principalement dans les administrations. On dénombre en outre une proportion non négligeable de voyageurs en tout genre. Une milice de neuf cents hommes veille sur les cent cinquante milles âmes ; cent cinquante d'entre eux sont plus spécifiquement attachés à la bibliothèque.

À trente-huit ans Numeynoeur est un des douze grands-lecteurs assermentés. Il a reçu son accréditation des mains de son oncle Ermyst Langevyn, vénérable de Ghelsaïs il y a vingt ans de cela. Il faut dire que dans cette ville où le népotisme fait loi, les postes importants échappent rarement aux cinq familles qui tiennent le haut du pavé. Durant ces longues années de service, Numeynoeur a su choisir ses missions avec sagesse, à savoir, celles qui lui permettaient de s'enrichir facilement sans avoir à s'enfoncer ni trop loin ni trop longtemps dans les profondeurs de la bibliothèque. Autant de décisions lucides qui lui ont permis de travailler activement en surface et d'espérer arriver bientôt à obtenir un siège au conseil des sages. Dans le même temps et pour honorer ses engagements de lecture, il a su s'attacher les services d'autres lecteurs assermentés, tous dévolus à sa cause soit par intérêt politique, soit par intérêt pécuniaire.

Asmufeld Lambru, lui, n'a pas eu la lucidité de son aîné. A bientôt trente-six ans il a gaspillé ses premières années de sacerdoce à réaliser des missions soi-disant importantes. La cité lui a toujours été reconnaissante de ces services réalisés pour le compte de puissants étrangers, mais dans le même temps elle se taillait de grosses marges dans ses émoluments. Sans compter que pendant ses longues périodes d'absence, les autres intriguaient dans les hautes sphères de la politique. Mais Asmufeld est résolu à rattraper le temps perdu et tente maintenant de se créer un réseau d'influence.

Mileyna Suyfeldt est une des rares femmes à avoir accès à la bibliothèque. Simple guide-lectrice de troisième catégorie, elle est consciente de l'importance du politique mais n'ambitionne aucunement de se battre dans le panier de crabe. Pour tout dire elle est totalement subjuguée par le monde de la bibliothèque, et espère bien un jour pouvoir découvrir quelques secrets sur son passé. En tous les cas c'est une des meilleures guides, capable de se repérer rapidement et de communiquer avec les autochtones, on fait généralement appel à elle lorsqu'il s'agit de sujets d'étude. Grande idéaliste, elle est d'ailleurs capable de travailler gratuitement. Cependant, comme personne n'a encore réussi à acheter sa dévotion, on ne fait généralement pas appel à elle pour les missions discrètes.

Fulkreyn Myllew dit le taciturne est un des rares parvenus ayant réussi, fils d'artisan, à se hisser au rang des primas. Mais il sait qu'il ne pourra jamais décemment se hisser beaucoup plus haut dans la hiérarchie, toutes les places étant occupées par des neveux de potentats. Qu'à cela ne tienne, il laisse cette tâche à sa postérité et se contente de veiller à leur avenir matériel. Pour ce faire il n'hésite pas à se charger de missions longues et périlleuses et à faire discrètement des extra pour diverses parties. Sa réputation d'efficacité et de discrétion ne sont plus a faire, si bien qu'il se voit systématiquement confier les missions sensibles. Si ses compétences sont à peine moins bonnes que celles de Mileyna en ce qui concerne la bibliothèque, ses connaissances dans le domaine des ombres et ses nombreux appuis à tous les niveaux de la société en font un concurrent d'une efficacité redoutable.

Malgré son jeune âge Flusmyl Biliat est le troisième sage du conseil. Fils cadet d'une grande famille de la ville il ne doit sa position qu'à son opiniâtreté et sa combativité de tous les instants. Petit, nerveux, colérique, il est de toutes les intrigues et de tous les coups de force. Pour l'heure, il lorgne du côté du siège du vénérable qui ne saurait tarder à être vaquant. Nul doute qu'il parviendra à se hisser dessus, s'il n'est pas victime d'un accident d'ici là.

Les résidents de la bibliothèque semblent y mener une existence parallèle. Ils tolèrent la présence d'intrus tant qu'elle n'est pas préjudiciable à leur tâche. Si la tranquillité du lieu est bafouée, les contrevenants ne tarderont pas à voir arriver les services de sécurité et à se faire éjecter manu militari. La communication n'est possible qu'à de rares initiés, et encore est-elle imparfaite.